MÉDAILLON DES DEUX ÉPÉES
- 16 avril 1771 -
Officiellement dénommé Médaillon des deux Épées, mais appelé couramment Médaillon de Vétérance, il peut être considéré, sous certains aspects, comme l’ancêtre de la Médaille militaire.
Dernière décoration de l’ancien régime, ce fut aussi la première distinction décernée aux sous-officiers ( appelés alors « bas-officiers ») et aux soldats en récompense de l’ancienneté de leurs services.
Il fut créé le 16 avril 1771, par l’article 14 de l'ordonnance royale du Roi Louis XV, dont le but était d’inciter les « bons soldats » et les bas-officiers, à se réengager dans l’armée en leur attribuant « haute paye, chevron et Médaillon des Deux Épées. » Primitivement destiné aux troupes de terre, l’ordonnance du 25 décembre 1774 en étendit l’attribution aux troupes et personnels de la Marine.
Par l’ordonnance du 11 septembre 1789, le roi accorda aux titulaires, outre l’exemption de la taille personnelle et des corvées en nature, celle du logement des troupes.
A l’origine, simple marque distinctive brodée et cousue sur le côté gauche de l’habit, à la hauteur de la troisième boutonnière ; il devint un insigne de forme ovale en laiton ou en cuivre, récompensant une ancienneté des services de 24 ans.
A 48 ans de services, le médaillon était double et il exista un cas unique de triple médaillon récompensant 72 des 91 ans de services du fusilier Jean Thurel, né à Orain ( Côte d'Or ), engagé au régiment de Touraine en 1716 et décédé à l’âge de 108 ans en 1807 !
Les armées du roi comptèrent un assez grand nombre de militaires portant cette décoration, dont le médaillon était remis, accompagné d’un brevet sur parchemin, lors d’une cérémonie solennelle en présence du régiment en armes, après que le titulaire eut prêté serment de fidélité au roi et à l'État : « Vous jurez et promettez de ne servir aucune puissance étrangère sans la permission de Sa Majesté et de ne jamais vous écarter de la fidélité que vous devez au Roi et à l'État ». Cette cérémonie et le serment de fidélité seront supprimés à partir de 1791, sous la monarchie constitutionnelle.
Très populaire, le Médaillon des deux Épées survécut à la loi du 6 août 1791, abrogeant les Ordres de la monarchie, ainsi qu’au décret du 20 août 1793 supprimant toutes les distinctions ( y compris celles d’origine révolutionnaire ). Toutefois, si l'on n'osa pas s'attaquer ouvertement aux insignes, il n'en fut pas de même pour les brevets. Ceux-ci furent brulés dans les districts avec une certaine solennité et remplacés par de nouveaux brevets en duplicata sur parchemin ou même sur papier libre, délivrés au nom de la République. Les mêmes attributs militaires continuèrent à les encadrer ; mais, au chiffre royal et aux fleurs de lys de la monarchie, l'on substitua le bonnet phrygien. Il en existe de nombreux spécimens ; le plus répandu est celui d'une déesse de la liberté, le bonnet phrygien au bout d'une pique, ayant une main appuyée sur une table de la Loi avec les mots traditionnels : liberté, égalité, et tenant une couronne de lauriers. Cette déesse, environnée de rayons de soleil, est assise sur un lion couché.
A partir de 1792, après que la Convention ait supprimé la Décoration militaire ( remise aux officiers jusqu’alors pour leur ancienneté de service ), le Médaillon des deux Épées fut attribué aux officiers aux mêmes conditions que pour les sous-officiers et les soldats.
Bien qu’aucun décret ne mentionne nommément sa suppression, le Médaillon des deux Épées semble n’avoir plus été remis, et même interdit de port, à partir de l'application de l'article 368 de la Constitution de l'an 3 ( entrée en vigueur à compter du 27 octobre 1795 ) qui stipule : « Nul ne peut porter de marques distinctives qui rappellent des fonctions antérieurement exercées ou des services rendus. »
Il récompensait les sous-officiers, les soldats, puis à partir de 1792, les officiers pour l’ancienneté des services :
– le simple médaillon pour 24 ans de services ;
– le double médaillon pour 48 ans de services ;
– le triple médaillon pour 72 ans de services.
A l’origine l’insigne brodé était cousu, puis fut fixé sur l’habit, lorsqu’il devint métallique.
D’une manière non réglementaire, certains surmontaient leur médaillon d’un anneau permettant sa suspension à l’aide d’un ruban généralement rouge ( rappel de l’Ordre de Saint-Louis ), parfois bleu, puis tricolore lors de la proclamation de la République.
Deux modèles officiels Terre :
– le premier fut simplement brodé et constitué par deux épées en sautoir, appliquées en laine de la couleur du revers sur le côté gauche de l'habit ;
– le second était une plaque ovale laurée, de 67 mm de hauteur et 53 mm de largeur, portant au centre deux épées croisées, la pointe en l’air et réunies par un nœud de ruban, le tout en laiton non doré et fixé, sur un fond de drap de couleur rouge.
Apparu en 1774, le modèle pour la Marine comportait une ancre complétant le faisceau des deux épées. Cet insigne et son port sont décrits dans l'article 45 de l'ordonnance du roi du 26 décembre 1774, portant création du corps royal d'infanterie de la Marine : « ... l’intention de Sa Majesté est qu’ils soient distingués par une plaque ornée d’une ancre, surmontée de deux épées en sautoir, brodées en laine jaune, sur un fond d’écarlate, et appliquée sur le côté gauche de l’habit ; et que lorsqu'ils se retireront chez eux, pour y jouir de leur solde ou demi-solde, conformément aux conditions ci-dessus énoncées, ils continuent de porter toute leur vie cette marque distinctive, et qu’ils emportent avec eux leur habit uniforme complet, ainsi que l’épée ou le sabre qu’ils portaient dans les Troupes de la Marine. »
Des insignes non réglementaires, réalisés par des fabricants privés, purent présenter des différences par rapport aux modèles officiels Terre et Marine.
A partir de la période révolutionnaire, l’insigne évolua : une pique et un bonnet phrygien complétèrent le faisceau des deux épées, celles-ci étant remplacées par deux sabres ou deux pistolets ( armes moins aristocratiques ).
Les médaillons pour les sous-officiers et les officiers étaient en bronze doré ou en argent doré et généralement de taille plus petite.
A l'origine, le commerce ne fut pas autorisé à fabriquer les médaillons. Le ministre seul les fournissait aux titulaires et ceux-ci ne pouvaient s'en faire délivrer de neufs que tous les trois ans, contre la remise des anciens. Cette mesure expliquerait suffisamment l'extrême rareté de ces décorations.
Aujourd’hui, les insignes des brevets militaires professionnels reprennent globalement la forme du Médaillon des deux Épées.
Brevet militaire
( Liste non exhaustive )
Source :
Bibliothèque nationale de France
De par le Roi.
Sa Majesté s'étant fait rendre compte des moyens qu'elle avoit jugé à propos d'employer pour assurer aux Soldats la récompense de leurs services, elle a reconnu que le prix qui avoit été réglé pour les rengagemens, n'étoit point proportionné au mérite de ces mêmes services, & ne procuroit à ceux qui se rengageoient, qu'un avantage faible & passager.
Que d'un autre côté, la demi solde promise à ceux qui se retireroient après avoir servi seize ans dans le même régiment, ne pouvoit, par la modicité de son objet, assurer des moyens de subsistance suffisans à ceux qui auroient consacré une partie de leur vie à son service.
Et désirant attacher les anciens Soldats à leur état par une augmentation de paye qui leur procure une aisance journalière & durable, & par des distinctions qui le leur fassent estimer, elle a cru qu'un objet aussi interessant exigeoit qu'elle fit connoître ses intentions ; en conséquence, elle a ordonné & ordonne ce qui suit :
ARTICLE PREMIER.
Tout Bas-Officier, Soldat, Cavalier, Hussard, Dragon, Tambour, Timbalier ou Trompette des Troupes Françoises, qui aura contracté un premier engagement de huit ans, & qui désirera continuer son service dans le même Régiment, pourra se rengager, après la sixième année de son engagement, pour huit autres années, qui commenceront à courir à l'expiration de son premier engagement ; il recevra sur le champ quinze livres, du fonds de la masse des recrues, & pareille somme de quinze livres à l'époque à laquelle commencera son rengagement, ou trente livres en un seul paiement, s'il ne se rengage qu'après son premier engagement révolu ; & indépendamment de ces trente livres, il recevra un sou par jour de haute-paye pendant toute la durée de son second engagement.
II.
Sa Majesté permet cependant à ceux qui ne voudront pas contracter un second engagement de huit ans, de ne se rengager que pour quatre ans, & alors ils recevront quinze livres seulement à l'expiration de leur premier engagement, & jouiront néanmoins du sou par jour de haute-paye pendant la durée dudit second engagement.
III.
Ceux qui, ayant servi seize ans dans le même Régiment, désireront y continuer leurs services pour parvenir à la vétérance, pourront se rengager pour huit années, & recevront trente livres ; ou pour quatre années seulement, & ne recevront alors que quinze livres, ainsi qu'il est expliqué dans l'article premier : & ils jouiront en outre, pendant la durée de leur rengagement de deux sous par jour de haute-paye, en sus de la solde attribuée à leur grade.
IV.
Ceux qui, par les époques différentes des engagemens qu'ils ont contractés, se trouveront à l'échéance de leurs rengagemens, n'avoir pas rempli précisément seize ou vingt-quatre années de service, seront néanmoins admis à se rengager, pour jouir des avantages que Sa Majesté accorde par la présente Ordonnance ; mais ils ne commenceront à toucher la haute-paye de la classe dans laquelle ils entreront, que lorsqu'ils auront atteint la révolution de seize ou vingt-quatre ans de service.
V.
Sa Majesté veut cependant bien permettre à ceux qui auront rempli deux engagemens consécutifs de huit ans chacun, dans le même Régiment, de se retirer chez eux pour y jouir de la demi-solde & d'un habit uniforme tous les huit ans, lorsqu'ils se trouveront par des infirmités ou des blessures, dans l'impossibilité absolue de continuer leurs services.
VI.
Ceux qui, ayant rempli consécutivement trois engagemens de huit ans dans le même régiment, auront acquis la vétérance, & désireront néanmoins continuer leurs services, pourront chaque année contracter un nouvel engagement pour un an seulement ; & indépendamment de la solde attribuée aux grades auxquels ils seront parvenus, ils jouiront pendant tout le temps qu'ils resteront au Régiment, d'une haute-paye, qui sera de cinq sous par jour pour les Fourriers, Sergens & Maréchaux-des-Logis, & de quatre sous pour ceux qui seront dans les grades inférieurs.
VII.
N'entend néanmoins Sa Majesté déroger à l'option accordée par l'article 40 de l'Ordonnance du premier janvier 1768, à tout homme qui aura servi vingt-quatre ans dans le même Régiment, d'être reçu à l'Hôtel Royal des Invalides, ou de se retirer chez lui pour y jouir de la solde entière, & d'un habit uniforme tous les six ans.
VIII.
Les Bas-Officiers, Soldats, Cavaliers, Hussards, Dragons, Tambours, Timbaliers & Trompettes qui seront dans le cas de jouir de la demi-solde, ou de la solde entière, ne recevront celle du grade qu'ils auront lors de leur retraite, qu'autant qu'ils auront servi dans ce grade pendant huit ans ; au défaut de quoi ils ne jouiront que de la solde du grade inférieur, conformément à l'article 41 de ladite Ordonnance du premier janvier 1768.
IX.
Les hautes-payes accordées par les articles premier, 3 & 6 ci-dessus, feront payées sur le fonds de la masse des recrues ; se réservant Sa Majesté d'augmenter ladite masse de ce qui sera jugé nécessaire pour la mettre en état de supporter cette dépense dans le cas où elle seroit insuffisante.
X.
Le décompte desdites hautes-payes, sera fait tous les mois à ceux qui seront présens sous les armes ; à l'égard de ceux qui seront aux Hôpitaux ou absens par congé, le décompte leur en sera fait pour le temps de leur absence ou de leur séjour aux Hôpitaux, aussi tôt qu'ils auront rejoint le Régiment ; l'intention de Sa Majesté étant que tous ceux qui auront acquis ces hautes-payes, en jouissent en tout temps, même en route, indépendamment de l'étape, & n'en puissent être privés que dans le cas où, sans cause légitime, ils ne rejoindront pas à l'expiration des congés limités qui leur seront accordés : voulant Sa Majesté que dans ce cas seulement, la retenue desdites hautes-payes leur soit faite pour tout le temps de leur absence, & que le montant de ladite retenue reste à la masse des recrues, ainsi que ce qui se trouvera dû de haute-paye aux Soldats morts, désertés, ou qui n'étant pas au corps, obtiendront leurs congés absolus avant le temps pour lequel ils se seront rengagés.
XI.
Les Inspecteurs arrêteront, lors de leurs revues, l'état des hautes-payes qui auront été payées pendant l'année pour chaque classe, & il sera fait dépense dans le compte de la masse des recrues, du montant de cet état, dont un double sera adressé sur le champ, par le Major du Régiment, au Secrétaire-d'Etat ayant le département de la guerre.
XII.
Pour faciliter le décompte de ces hautes-payes, chaque Capitaine, ou l'Officier qui commandera la Compagnie en son absence, remettra tous les mois au Major du Régiment, un état certifié de lui, des hommes de chaque classe présens sous les armes, qui seront dans le cas de jouir des hautes-payes, & le Major en fera remettre le montant à l'Officier qui en fera lui-même la distribution, & en demeurera responsable ; tous ces états seront représentés par le Major à l'Inspecteur, pour servir à l'appui de l'état général qui sera arrêté lors de la revue d'inspection.
XIII.
Sa Majesté voulant aussi accorder aux anciens Soldats des marques distinctives qui puissent les faire reconnoître, elle a ordonné que tout homme qui aura servi huit ans, & qui s'étant rengagé dans le même Régiment, aura passé dans la seconde classe, portera sur le bras gauche un chevron en laine de la couleur du revers ; & que celui qui après avoir servi seize ans, se sera rengagé dans le même Régiment pour passer dans la troisième classe, portera deux chevrons au-dessus l'un de l'autre sur le même bras.
XIV.
A l'égard des vétérans, l'intention de Sa Majesté est qu'ils soient distingués par deux épées en sautoir, appliquées en laine de la couleur du revers sur le côté gauche de l'habit, & que lorsqu'ils se retireront, soit aux Invalides, soit chez eux, pour y jouir de leur solde entière, ils continuent de porter toute leur vie cette marque distinctive, & qu'ils emportent avec eux le sabre qu'ils portoient au Régiment.
XV.
Sa Majesté désirant que tous ceux qui se sont rengagés précédemment, puissent participer aux avantages accordés par la présente Ordonnance, elle veut qu'ils puissent être admis dès-à-présent à la haute-paye proportionnée au temps de leurs services ; à la charge toutefois que le décompte ne leur en sera fait que lorsque les retenues auront remboursé à la masse des recrues, le montant des sommes qui leur ont été payées pour prix de leurs rengagemens au-delà de la somme de trente livres.
XVI.
Ceux qui auront servi dans différens Régimens, pourront être admis à jouir des hautes-payes & des distinctions accordées par la présente Ordonnance, s'il n'y a point une interruption de six mois entre leurs différens engagemens : mais ils n'en jouiront cependant qu'après avoir servi six ans au-delà du terme prescrit pour mériter ces hautes-payes, conformément aux dispositions contenues dans l'article 43 de l'Ordonnance du premier janvier 1768.
XVII.
N'entend néanmoins, Sa Majesté, comprendre dans la disposition portée par l'article précédent, les Miliciens qui ont été incorporés dans les Régimens ; voulant au contraire que dans tous les cas, le temps de leurs services, pour parvenir aux hautes-payes ou à la vétérance, soit compté du jour de leur entrée dans les bataillons d'où ils ont été tirés pour être incorporés.
XVIII.
S'il arrivoit qu'un homme, après avoir rempli un, ou plusieurs engagemens dans un Régiment, & ayant obtenu son congé absolu, eût des raisons valables pour désirer de passer dans un autre, Sa Majesté veut bien permettre qu'il y soit reçu & admis aux mêmes avantages dont il auroit joui dans le Régiment où il servoit, pourvu qu'il n'y ait pas une interruption de service de six mois, & qu'il soit porteur d'un certificat du Commandant du Corps qu'il aura quitté, par lequel il sera constaté qu'il s'est bien comporté dans ce Régiment, que les motifs de son changement sont fondés, & qu'il peut être reçu sans difficulté dans le Régiment où il demandera à servir : au défaut duquel certificat, il ne pourra être admis que comme Soldat de recrue.
XIX.
Il sera permis à tous ceux qui ont obtenu leur congé absolu, depuis la dernière revue d'inspection, de rentrer dans les Régimens d'où ils sont sortis ; & en y contractant un nouvel engagement, ils seront admis à jouir des hautes-payes & des distinctions proportionnées à l'ancienneté de leurs services, pourvu qu'ils se rengagent avant le premier octobre de la présente année, passé lequel temps ils ne seront plus reçus que comme recrues.
XX.
Les Corps qui n'ont point de masse de recrue, jouiront des avantages accordés par la présente Ordonnance, le temps de service des hommes qui les composent, sera compté du jour de leur entrée dans les Régimens d'où ils auront été tirés ; & comme ces Corps n'ont aucun fonds pour cet objet, il y sera pourvu particulièrement pour la dépense des hautes-payes & des frais de rengagemens.
XXI.
A l'égard du Régiment d'Infanterie de Sa Majesté, du Corps Royal de l'Artillerie, & des Régimens étrangers qui sont à son service, il sera pourvu par des dispositions particulières aux moyens d'assurer aux Bas-Officiers & Soldats, les récompenses dûes à l'ancienneté de leurs services.
XXII.
Sa Majesté voulant traiter favorablement ceux des Bas-Officiers, Soldats, Cavaliers, Hussards ou Dragons, qui étant par différentes raisons nécessaires à leur famille, ne peuvent obtenir leur congé par ancienneté, elle a réglé que le nombre de ceux à qui la permission de se dégager seroit accordée, seroit porté chaque année à un homme par Compagnie dans chaque espece de troupe ; à la charge par eux de remplir les conditions prescrites par l'article 31 de l'Ordonnance du premier janvier 1768.
XXIII.
Veut au surplus Sa Majesté que les Ordonnances qu'elle a rendues précédemment, sur la forme & la durée des engagemens & rengagemens, soient ponctuellement exécutées dans toutes les dispositions auxquelles il n'est point dérogé par la présente, qui commencera à avoir son exécution du premier mai prochain.
Mande & ordonne Sa Majesté aux Officiers-Généraux ayant commandement sur ses troupes, aux Gouverneurs & Lieutenans-Généraux dans ses Provinces, aux Gouverneurs & Commandans de ses villes & places, aux Inspecteurs-Généraux de ses troupes d'Infanterie & de Cavalerie, aux Intendans dans ses Provinces, aux Commissaires des Guerres, & à tous autres ses Officiers qu'il appartiendra, de tenir la main à l'exécution de la présente Ordonnance.
Fait à Versailles, le seize avril mil sept cent soixante-onze.
Louis.
Monteynard.
A Versailles le 22 septembre 1771.
Quoique l'Ordonnance du 16 avril dernier, Monsieur, semble ne rien laisser à désirer sur les conditions prescrites, pour être les Bas-Officiers, Soldats, Cavaliers & Dragons admis à porter les marques de la vétérance, & les autres distinctions qui ont été réglées, proportionnément au temps de leurs services, il a néanmoins été reconnu que quelques Régimens s'étoient crû autorisés à faire porter les marques de la vétérance à des sujets qui n'avoient servi que vingt-quarre années dans différens Régimens, lorsque d'autres Corps, en suivant littéralement les dispositions de l'Ordonnance, avoient exigé que les vingt-quatre années eûssent été accomplies consécutivement dans le même Régiment, ou que les sujets ayant servi dans différens Corps, eûssent accompli, sans interruption de six mois entre les engagemens, le terme révolu de trente années, conformément à l'article XVI. de ladite Ordonnance, & craignant qu'une pareille différence de traitement ne fût capable de faire perdre une partie des avantages qu'on s'est promis de l'institution de la vétérance & du prix qu'on y doit attacher, ou qu'insensiblement cette récompense ne devint trop arbitraire & trop personnelle aux sujets protégés, si dès le commencement, on ne donnoit a cet établissement une forme fixe & constante.
Sa Majesté voulant expliquer plus particulièrement ses intentions à cet, égard, Elle a ordonné qu'aucun Bas-Officier, Soldat, Cavalier ou Dragon ne pourroit porter le médaillon de la vétérance, sans auparavant en avoir obtenu la lettre ou brévet, signé du Secrétaire d'État ayant le Département de la Guerre, & avoir prêté le serment ordonné entre les mains du Commandant de chaque Corps, ou de tel autre Officier de ses Troupes qui auroit été commis à cet effet ; Elle veut que celui de ses Gens de Guerre qui, quinze jours après la publicité de la présente disposition, porteroit la plaque des deux épées en sautoir, sans au préalable en avoir obtenu le brévet, ou qui l'auroit surprise sur de faux certificats de service, soit déclaré indigne de jamais porter à l'avenir cette marque de distinction, & qu'elle lui soit arrachée à la tête de la Garde.
Le Roi étant pareillement informé que, quoique par l'article VI. de ladite Ordonnance, Sa Majesté ait accordé aux seuls vétérans, qui desireroient de continuer leurs services, la permission de contracter un nouvel engagement pour l'espace d'un an seulement, il existoit néanmoins des Régimens qui avoient l'indulgence mal entendue de permettre aux Bas-Officiers & autres, qui n'étoient point dans la classe de la vétérance, de se rengager, pour un an, d'une revue à l'autre, & de demeurer même dans le Corps sans être engagés ; & considérant qu'une pareille tollérance est préjudiciable & contraire à la sûreté & au bien de son service, Sa Majesté a déclaré qu'Elle ne reconnoit dans ses Troupes que des sujets engagés, conformément à ses Ordonnances, pour quatre ou huit ans ; & que, si, par des arrangemens particuliers, il s'entrouvoit d'engagés pour un terme moins long qu'il n'a été autorisé par la disposition de ses Ordonnances, Elle ne peut les regarder que comme rengagés au moins pour quatre ans à compter de l'époque où a fini leur dernier congé ; défend expressément Sa Majesté, des permissions ou tollérances qui seroient contraires à cette disposition, & Elle rend les Officiers supérieurs de l'État-Major responsables de l'exécution littérale des Ordonnances à cet égard, son intention étant que les conditions exigées pour la vétérance, qui est la prérogative la plus distinguée que le Roi ait bien voulu accorder à ses Troupes, soient scrupuleusement observées, & pour que chacun puisse être suffisamment informé de la volonté du Roi à cet égard, l'intention de Sa Majesté est que vous fassiez faire lecture de la présente, au cercle de l'Ordre, après la parade, & que copie en soit affichée dans les corps-de-garde de la Place où vous commandez. Vous voudrez bien m'en accuser la réception, & tenir la main à l'exécution des dispositions qu'elle contient.
Je suis très-parfaitement, Monsieur, votre très-humble & très-obéissant serviteur,
Monteynard.
Paris, le 25 floréal an 3 ( 14 mai 1795 ).
A nos frères d'armes,
Nous voyons avec regret, citoyen, que d'anciens militaires, recommandables par leurs talents, leur bravoure et leur expérience dans l'art de la guerre, voudraient se distinguer de leurs camarades en portant le médaillon avec un ruban tricolore, comme on portait autrefois la croix de Saint-Louis, tandis qu'il doit être attaché à la hauteur de la troisième boutonnière, sans aucune décoration et de la même forme de ceux qui sont envoyés à tous les vétérans.
Nos braves et généreux frères d'armes soldats, qui versent leur sang pour le soutien de la République, n'ont pu s'empêcher de porter leurs plaintes sur un abus contraire à l'Égalité qui, dans certaines circonstances, doit exister entre les chefs et ceux qui leur sont subordonnés en vertu de la loi. Tous devant elle sont égaux quoiqu'ils ne puissent l'être du côté des places, des traitements et de la fortune : l'ordre social admet cette seule distinction, mais aussi ceux qui commandent leurs semblables doivent les premiers suivre les lois, ne pouvant se soutenir eux-mêmes s'ils n'en sont les plus fidèles observateurs.
Dégagé du système affreux de la Terreur et du despotisme, système proscrit avec raison par tous les Français qui ont le sentiment de leur existence, nous sommes persuadés, frères et amis, que cette invitation à se conformer aux règlements concernant la vétérance n'éprouvera aucun obstacle de la part des militaires qui savent si bien allier la bravoure et la générosité à l'Egalité républicaine.
Informés que quelques militaires portent la marque distinctive de la vétérance sans avoir obtenu le brevet, les autorités constituées, les généraux et états-majors des armées, les Conseils d'administration, les commandants et états-majors des places, les chefs de corps, les commissaires ordonnateurs et les commissaires des guerres doivent prendre tous les moyens qui sont en leur pouvoir pour remédier à un aussi grand abus et même dénoncer ceux qui se permettront une telle infraction.
La Commission des secours publics.
En conséquence de l'article 368 de la Constitution qui dit : « Nul ne peut porter de marques distinctives qui rappellent des fonctions antérieurement exercées ou des services rendus », le général en chef ordonne que tous les militaires en activité, ainsi que ceux retirés aux Invalides, seront tenus de quitter le médaillon.
Cet article de la Constitution préservant l'égalité pour tous et devant être observé par les militaires en activité ainsi que par tous ceux retirés du service, les chefs de poste donneront la consigne à toutes les sentinelles de faire entrer au Corps de garde à toute heure et de quelque habit qu'elles soient revêtues, les personnes qui en seraient décorées et ils leur feront quitter cette marque de distinction en leur rappelant l'article de la Constitution qui les défend toutes.
Le Commandant de la place de Paris.
Cherasco, le 7 floréal an 4 ( 26 avril 1796 ).
Le général Berthier, chef de l'état-major.
Par ordre du général en chef Bonaparte.
Le général en chef me charge de faire connaître aux généraux de division les dispositions de la lettre du Directoire exécutif concernant le médaillon ; elle rappelle à l'exécution de l'article 368 du titre XIV de la Constitution qui est trop clair pour avoir besoin d'explication. Il suffit donc que les généraux donnent l'exemple de soumission à la loi pour que chacun s'y conforme.