ORDRE DE SAINT-LAZARE
ET DE NOTRE-DAME
DU MONT-CARMEL
- 31 octobre 1608 -
L’Ordre de Saint-Lazare et de Notre-Dame du Mont-Carmel résultait de la fusion de deux Ordres royaux.
Avant de l’étudier, revenons en quelques lignes, sur l’origine de l’Ordre de Saint-Lazare.
Selon une légende, ce fut 125 ans avant la naissance du Christ, qu’aurait été créé l’Ordre de Saint-Lazare. Mais Saint-Lazare, qui était le frère de Marie et de Marthe, fut selon la Bible, ressuscité à Béthanie ( Palestine ) par Jésus Christ.
Avant la reconquête de Jérusalem par les croisés en 1099, un hôpital accueillant les lépreux avait été créé aux portes de la ville sainte et placé sous le patronage de Saint-Lazare. Lors des croisades, les religieux servant cet hôpital créeront vers 1060 un Ordre religieux militaire composé de moines-soldats hospitaliers, l’Ordre de Saint-Lazare de Jérusalem, dont les Chevaliers portaient sur l’habit, à hauteur de la poitrine, une grande croix de tissu vert. L’Ordre partageait son activité entre les œuvres de guerre et de miséricorde. Après la perte de Jérusalem en 1187, l’Ordre se réfugia en France en 1291 et se plaça sous la protection du Roi Louis VII, qui lui attribua le château de Boigny, situé près d’Orléans ; ce lieu devenant dès lors la résidence du Grand maître de l’Ordre. La gestion de toutes les maladreries du royaume lui fut confiée et de nombreuses commanderies furent alors établies sur tout le territoire du royaume de France. Les derniers membres de l’Ordre restés présents en Terre sainte en furent chassés en 1253. Ces éléments suivirent le Roi Saint-Louis et rallièrent Boigny. Avec le temps, la diminution graduelle du nombre des lépreux entraîna pour l’Ordre des bouleversements. Le rôle et l’importance de l’Ordre déclinant, sa réunion avec l’Ordre de Notre-Dame de Bethléem fut envisagée par le Pape Pie II. Cette entreprise étant restée sans suite, il faillira disparaître en 1490 lorsque le Pape Innocent IV tentera de le supprimer en l’intégrant à l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Le royaume de France s’opposera à cette décision. Finalement, en 1572, la branche italienne de l’Ordre et ses biens fusionneront avec l’Ordre de Saint-Maurice fondé par le duc de Savoie, pour donner naissance, vers 1600, à l’Ordre des Saints Maurice et Lazare. Toutefois, le Roi de France avait gardé les biens de la branche française de l’Ordre de Saint-Lazare. C’est ainsi qu’en 1608, Henri IV réunit ces biens et la grande maîtrise, à l’Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel.
Les 16 et 28 février 1608, le Pape Paul V créait, à la demande du Roi Henri IV, l’Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel ; sans doute comme une preuve de la sincérité de la conversion à la foi catholique du Roi de France, le 25 juillet 1593.
Le 31 octobre 1608, le roi fusionnait le nouvel Ordre avec la branche française de l’ancien Ordre de Saint-Lazare. Ainsi fut créé l’Ordre de Saint-Lazare et de Notre-Dame du Mont-Carmel, composé de 100 Chevaliers issus de la grande noblesse ( huit quartiers de noblesse ), rompus à la carrière des armes et astreints à une discipline religieuse rigoureuse. C’était un Ordre à caractère militaire, dont le chef souverain, le roi, désignait le Grand maître. C’est le dernier Grand maître de l’Ordre de Saint-Lazare, Philibert de Nérestang, qui fut le premier à être nommé, le 4 avril 1608, à cette charge. Lui succéderont, François-Michel le Tellier, marquis de Louvois, puis Philippe de Courcillon, marquis de Dangeau. Cette grande maîtrise revint ensuite aux princes de sang du royaume : le duc d’Orléans, le duc de Berry et enfin le comte de Provence.
Sous le règne du Roi Louis XIV, l’Ordre de Saint-Lazare et de Notre-Dame du Mont-Carmel perdra son caractère spécifiquement militaire, à partir de la création de l’Ordre royal et militaire de Saint-Louis. Il récompensera dès lors des personnes issues de la petite noblesse, des bourgeois récemment anoblis, voire des roturiers comme les architectes Jules Hardouin-Mansart et André Le Nôtre. Au 18e siècle, l’Ordre fut bien souvent décerné à des personnalités du corps diplomatique.
La bulle papale de 1668 permit enfin à l’Ordre de Saint-Lazare et de Notre-Dame du Mont-Carmel, d’être reconnu par le Saint-Siège. En effet, jusqu’alors la Grande maîtrise était reconnue par ce dernier comme étant uniquement celle de l’Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel.
L’édit royal de 1672, permit à l’Ordre d’être pourvu d’une dotation, constituée de toutes les propriétés foncières, tous les biens, droits et revenus des Ordres éteints ou supprimés. Par ailleurs, tous les hôpitaux, léproseries et autres institutions hospitalières lui furent attribuées. Devenant financièrement puissant, il fut alors possible de verser une rente aux officiers titulaires de l’Ordre. Son activité fut centrée en particulier, sur l’assistance aux pauvres, notamment les militaires retirés de l’armée et dans la nécessité. Dans le domaine diplomatique, l’Ordre s’occupait des contacts avec les états d’Orient et avec ceux du Maghreb. Il fit aussi la chasse aux pirates, en armant à Saint-Malo deux voiliers, le « Saint-Lazare » et le « Notre-Dame du Mont-Carmel ».
Le dernier Grand maître, le comte de Provence ( le futur Louis XVIII ), voulut réorganiser l’Ordre en créant deux classes de Chevaliers et en lui confiant l’éducation des jeunes officiers du royaume ; l’administration de l’École royale Militaire de Paris lui étant dévolue et l’admission dans l’Ordre octroyée à trois élèves par an. Sous son autorité, le vert est adopté comme nouvelle couleur du ruban et un modèle de collier est adopté.
Mais la Révolution contrariera ces projets, car l’Ordre de Saint-Lazare et de Notre-Dame du Mont-Carmel sera, à l’instar des autres Ordres monarchiques, aboli par le décret du 15 octobre 1792.
Malgré cela, il continua à être décerné à des fidèles ou des étrangers servant le roi en exil.
Sous la Restauration, l’Ordre de Saint-Lazare et de Notre-Dame du Mont-Carmel ne fut pas attribué par les Rois Louis XVIII et Charles X ; l’Ordre étant contraire aux principes de la charte constitutionnelle du 2 mai 1814, dont un texte consacrait l’égalité des sujets du roi. Cependant, l’Ordre survivra en s’éteignant doucement ; l’instruction du grand chancelier de la Légion d'honneur, du 5 mai 1824, pour l'exécution de l'ordonnance du 16 avril 1824, précisant que l’Ordre est toléré mais plus conféré depuis 1788. Par ailleurs, il sera demandé aux titulaires de ne plus en porter les insignes. Finalement, l’Ordre de Saint-Lazare et de Notre-Dame du Mont-Carmel sera définitivement supprimé en 1830.
Curieusement, vers 1910, un « Ordre de fantaisie » se faisant appeler « Ordre de Saint-Lazare de Jérusalem » est apparu en Europe. C’est une réminiscence bouffonne, voire une escroquerie historique condamnée en 1935 et 1953 par le Saint-Siège dans un solennel avertissement aux catholiques sur la valeur de ce pseudo-Ordre.
Ordre de Saint-Lazare : ruban de couleur verte.
Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel : ruban de couleur amarante ( rouge foncé tirant sur le violet ).
Ordre de Saint-Lazare et de Notre-Dame du Mont-Carmel : initialement, le ruban utilisé fut celui de l’Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel, changé en 1773 au profit de celui de l’Ordre de Saint-Lazare.
Ordre de Saint-Lazare
Originellement, les Chevaliers de l’Ordre de Saint-Lazare portaient sur leur robe une grande croix verte en tissu.
Ils adopteront ultérieurement le port d’une croix double face en or à quatre branches anglées de fleurs de lys d’or et terminées par huit pointes boutonnées.
Le centre de chaque branche portait une queue d’aronde, émaillée de vert et bordée d’émail blanc sur l’extérieur.
Sur l’avers : le médaillon central portait l’effigie en pied de Saint-Lazare entouré par la devise ATAVIS ET ARMIS sur un fond d’émail vert.
Sur le revers : le médaillon central, cerclé d’or, représentait Saint-Lazare sortant du tombeau.
Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel
Croix double face en or à quatre branches anglées de fleurs de lys d’or et terminées par huit pointes boutonnées.
Le centre de chaque branche portait une queue d’aronde, émaillée amarante et bordée d’émail blanc sur l’extérieur.
Sur l’avers : le médaillon central, cerclé d’or, portait l’effigie en pied de la Vierge à l’enfant entourée de rayons dorés.
Sur le revers : le médaillon central, cerclé d’or, portait trois fleurs de lys sur fond doré.
Ordre de Saint-Lazare et de Notre-Dame du Mont-Carmel
Croix double face en or à quatre branches anglées de fleurs de lys d’or et terminées par huit pointes boutonnées.
Le centre de chaque branche portait une queue d’aronde, émaillée amarante sur l’avers et vert sur le revers, bordée d’émail blanc sur l’extérieur.
Sur l’avers : le médaillon central portait l’effigie en pied de la Vierge à l’enfant entourée de rayons dorés.
Sur le revers : le médaillon central représentait Saint-Lazare sortant du tombeau entouré par la devise ATAVIS ET ARMIS sur fond d’émail vert.
Vers le milieu du 18e siècle, une couronne royale surmontera la croix.
1779 vit la création d’un collier, réalisé par Formey, devant être porté par les Chevaliers les jours de cérémonies et arboré dans leurs armoiries. L’orfèvre fabriquera ainsi 92 colliers composés de mailles en or représentant le chiffre de la Vierge, celui de Saint-Lazare et de palmes vertes placées en croix. Douze groupes de cinq grains de chapelet en argent séparaient les mailles. La croix de l’Ordre était suspendue au collier à l’aide d’une chaînette d’or.
La plaque, brodée, était faite d'une grande croix de malte à huit pointes de soie verte portant au centre une croix grecque en argent. Sur cette dernière était gravée la devise de l’Ordre ATAVIS ET ARMIS ainsi que les monogrammes MA ( pour la Vierge Marie ) et SL ( pour Saint-Lazare ).
Les Chevaliers de première classe verront, à partir de 1778, leur plaque bordée par des paillettes d’or.
Une croix dite de « minorité » fut attribuée, entre 1754 et 1779, aux meilleurs élèves officiers de l’École royale Militaire de Paris. Cette petite croix, d’un diamètre de 22 mm et représentant les deux Ordres réunis, fut remplacée à partir de 1779 par la croix de l’Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel.
( Liste non exhaustive )
Sources :
Bibliothèque nationale de France & Google books
PAUL V, PAPE,
Pour mémoire perpétuelle de la chose.
Le Pontife romain, dont la Majesté Divine a élevé la puissance au-dessus des autres puissances, exauce volontiers les prières de ses enfants pieux et très-soumis, qui désirent non-seulement d'égaler leurs ancêtres, mais encore de transmettre à leur postérité, avec des accroissements notables, la noblesse qu'ils en ont reçue ; et il approuve qu'ils remplissent des vues qui lui paraissent selon Dieu, puisqu'elles sont utiles à la défense et à la conservation de la foi catholique, à la destruction de ses ennemis, et à procurer le salut des âmes.
I.
Notre fils bien-aimé, noble homme, Charles de Neufville, Seigneur d'Alincour, Chevalier des Ordres du Roy, nous a exposé au nom de notre très-cher fils en Jésus-Christ, Henri, Roy de France très-chrétien, dont il est ambassadeur auprès de nous et du Saint-Siège apostolique, que ce même Roy désirait particulièrement, comme fils aîné de l'Église, de défendre la religion, et de contribuer à ses progrès, en continuant d'employer les moyens dont il s'est servi dans son royaume et les lieux de son obéissance, depuis son heureux avènement au trône, pour l'exaltation de l'Église romaine, l'extirpation des hérésies et la destruction des hérétiques ; ce qui lui faisait fortement souhaiter d'ériger et instituer, sous notre bon plaisir et sous l'autorité du Saint-Siège, une Milice ou Ordre Militaire, qu'il dotera suffisamment de biens purement laïques, et non point de bénéfices ou revenus ecclésiastiques, et qui sera composé de personnes nobles et d'une naissance distinguée, sous le nom, le titre et la règle de la très-glorieuse et toujours Vierge Marie, mère de Dieu, Notre-Dame du Mont-Carmel, que le même Roy a pris pour sa patronne et avocate, et qu'il honore toujours d'une dévotion particulière. Ledit Charles de Neufville nous a humblement supplié de favoriser de nos grâces spéciales le même Roy, et de satisfaire à la demande de Sa Majesté.
II.
Désirant donc contribuer à l'accomplissement d'un dessein aussi pieux, et qu'on ne saurait trop louer, ayant absous et tenant pour absous le même Roi Henri, à l'effet des présentes, de toutes sentences et excommunication, suspension, interdit, et autres censures et peines ecclésiastiques portées contre lui de droit ou par les hommes, pour quelques causes ou occasions que ce soit ; et condescendant à ces mêmes demandes, nous avons, par l'autorité apostolique et par la teneur des présentes, érigé et institué sous la susdite règle, pour, maintenant, et à l'avenir à perpétuité, et sans préjudice d'autrui, ladite Milice et Ordre Militaire, dont le siège et couvent principal sera assigné et établi par le même Roy, dans tel lieu de son royaume ou pays de sa domination que voudra choisir Sa Majesté. Il y aura un Grand-Maître, qui tiendra la suprême et principale dignité, sera comme le chef de ladite milice et du couvent établi par le même Roy Henri, et y recevra tel nombre de Chevaliers et Officiers qu'il lui plaira. Les Grand-Maître et Chevaliers pourront seulement contracter mariage une première fois, et se marier en secondes noces, même avec une veuve. Ils feront vœu de chasteté conjugale et d'obéissance à leur supérieur ; porteront l'image de la bienheureuse Vierge Marie Notre-Dame du Mont-Carmel, avec un habit différent des autres Ordres militaires, qu'ils ne pourront changer ; et enfin ils auront une table magistrale, des prieurés, des commanderies, et autres bénéfices et offices qui seront dotés, comme on a dit, de biens purement laïques, et non de revenus ecclésiastiques.
III.
Lorsque la Grande-Maîtrise sera vacante, dès le commencement de son érection et institution, ou quand elle vaquera dans la suite, de quelque manière que ce soit, et de quelque qualité que soit la personne, même auprès du Saint-Siège, ou en quelque autre temps et manière qu'elle vienne à vaquer, la provision et entière disposition en doit appartenir au Roy Henri, et aux Rois de France ses successeurs.
IV.
La première fois que vaquera la Grande-Maîtrise, ainsi que toutes les autres vacances qui la suivront, celui qui en sera pourvu par le Roy sera tenu et obligé d'en demander et obtenir du Saint-Siège, dans trois mois, une nouvelle provision et confirmation : de plus, il sera obligé de faire et d'envoyer, sous ledit temps, au même Saint-Siège, sa profession de foi signée de sa main, suivant les articles donnés par le Siège Apostolique ; en sorte que ledit Grand-Maître ne pourra faire aucunes fonctions de sa charge, ni gouverner la même Milice, qu'il n'ait obtenu sa nouvelle provision du Pape, et qu'il n'ait envoyé, comme dit est, sa profession de foi. Enfin nous avons concédé et appliqué à perpétuité à ladite Milice la dot et tous les biens que ledit Roy lui fait et lui fera.
V.
Les Grands-Maîtres qui succèderont au premier, pourront transférer le siège principal de la même Milice ou Ordre en tout autre lieu qu'il n'était, même maritime, du royaume de France, pays et terres de l'obéissance du Roy très-chrétien, avec la permission du Saint-Siège ; et ils y pourront créer des Chevaliers, qui seront obligés de faire la même profession de foi et serment de fidélité, tant au Pontife romain qu'à leur Grand-Maître.
VI.
Par la même autorité et teneur des présentes, nous leur accordons le pouvoir et la faculté de faire des règlements, statuts et ordonnances concernant le bon gouvernement de la même Milice ou Ordre, qui seront approuvées du Saint-Siège Apostolique, et de changer ceux qui auront été faits en d'autres plus convenables, à la disposition des choses et des circonstances des temps, pourvu que ces règlements soient licites et honnêtes, et non contraires aux saints canons, particulièrement aux décrets du Concile de Trente, et aux constitutions apostoliques.
VII.
Ledit Grand-Maître pourra, à perpétuité, et dans tous les temps à venir, par lui-même et non par d'autres, selon l'établissement et les susdits décrets, pourvoir les Chevaliers et les personnes dudit Ordre, de tous et d'un chacun Prieurés, Commanderies, Membres et autres Bénéfices ecclésiastiques de ladite Milice ou Ordre érigé, comme dit est, quand ils viendront à vaquer, de quelque manière que ce soit, par la mort des personnes, de quelques qualité et condition qu'elles puissent être, même portant quelques réserves que ce soit, et même auprès du Saint-Siège Apostolique.
VIII.
Les Prieurs, Commandeurs et Chapelains de la même Milice ou Ordre, après avoir obtenu le consentement et la permission de leur Grand-Maître, avec l'approbation de l'Ordinaire des lieux, pourront célébrer la messe dans les Églises de l'Ordre, administrer les sacrements de l'Église dans tous les temps aux Chevaliers et autres personnes dudit Ordre, même d'administrer l'extrême-onction à l'article de la mort, sans cependant préjudicier aux droits des Églises Paroissiales et de leurs Curés ; ils pourront aussi, après avoir été approuvés des Ordinaires, entendre leurs confessions, et les absoudre de leurs péchés en la forme ordinaire de l'Église, leur ayant imposé une salutaire pénitence.
IX.
De la même autorité Apostolique, et en vertu des présentes, nous dispensons lesdits Grand-Maître, Chevaliers, Prêtres et Chapelains, tous et un chacun d'iceux, tant clercs que laïques, même mariés et bigames, non toutefois trigames, et leur accordons par une grâce spéciale de pouvoir posséder une ou plusieurs pensions annuelles à eux réservées ou à réserver ; savoir le Grand-Maître, jusqu'à la somme de quinze cents ducats, et les Chevaliers jusqu'à celle de cinq cents ducats d'or de la chambre, sur les revenus, droits, émoluments, distributions quotidiennes des cathédrales métropolitaines, et autres églises et monastères, même consistoriaux, prieurés, dignités, personnats, administrations, offices, et autres bénéfices ecclésiastiques, qualifiés de quelque manière que ce soit, dans les royaume et pays de la domination du Roy, encore bien qu'après les réservations desdites pensions ils aient contracté mariage, et, comme dit est, qu'ils soient bigames, et non trigames ; desquelles pensions ils pourront librement et licitement jouir, se faire payer, et les convertir en leur usage, pendant leur mariage et leur vie durant, avec les commanderies et bénéfices de la même Milice et Ordre.
X.
En outre, nous exemptons à perpétuité, et délivrons la même Milice et les Chevaliers, leurs biens et revenus, de toutes sortes de charges, et impositions mises ou à mettre, et de l'entière dépendance de la juridiction des Ordinaires, et les soumettons entièrement à la supériorité, juridiction et obéissance du Grand-Maître.
XI.
Enfin, pour augmenter la dévotion des fidèles de Jésus-Christ, et pour procurer le salut, par la miséricorde de Dieu tout-puissant, par l'autorité des bienheureux Apôtres Saint Pierre et Saint Paul, et par la même autorité des présentes, nous donnons et concédons à perpétuité, miséricordieusement en notre Seigneur, indulgences plénières auxdits Grand-Maître, Chevaliers et personnes dudit Ordre, qui étant confessées et vraiment pénitentes, et ayant reçu la sainte Communion, tant les jours qu'elles seront reçues dans ledit Ordre, et qu'elles y feront profession, que tous les ans au jour et fête de la bienheureuse Vierge Marie Notre-Dame du Mont-Carmel, qui arrive le 16 juillet, depuis les premières vêpres jusqu'au soleil couché de ladite fête, comme aussi à l'article de la mort, étant contrits et prononçant de cœur, si elles ne le peuvent de bouche, le très-saint nom de Jésus.
XXI.
C'est pourquoi nous mandons à nos bien-aimés fils les officiaux des évêchés du Puy, de Damas et de Paris, par la teneur des présentes, que tous, ou deux, ou un d'entre eux, publient ou fassent publier, de notre autorité, les présentes et le contenu en icelles, toutes fois et quantes il en sera nécessaire ; veillent à ce qu'elles soient gardées par tous ceux à qui il appartient, ou qu'il appartiendra ; ne souffrant pas que lesdits Chevaliers soient troublés en aucune manière, ni par qui que ce soit ; et contraignant par sentences, censures, peines ecclésiastiques, et autres moyens de fait et de droit, qu'ils jugeront à propos, les rebelles et tous ceux qui voudraient contredire et refuser d'obéir aux présentes.
XIII.
Nonobstant toutes constitutions et ordonnances Apostoliques, protestations des susdites Églises confirmées par le Saint-Siège, ou autrement, statuts, coutumes, indults, et lettres Apostoliques qui leur auraient été concédées, ou à leurs prélats, chapitres, couvents, supérieurs et personnes, sous quelque teneur et forme, et avec quelques clauses ou décrets, au contraire, et en quelque manière que ce soit, auxquels pour cette fois nous dérogeons spécialement et expressément, tout ainsi que si dans les présentes il était fait spéciale, spécifique, expresse et singulière mention de leur teneur, et non par ces clauses générales signifiant la même chose ; lesquelles néanmoins demeureront d'autre part dans leur force et valeur, et à toutes choses contraires, même à l'indult, que quelques-unes des personnes susdites auraient obtenu du Saint-Siège, portant défense par des lettres Apostoliques de les interdire, suspendre, ou excommunier, si ces lettres ne font une entière mention, de mot à mot, de cet indult.
XIV.
Que personne donc ne soit assez hardi de contredire, par un attentat téméraire, ni de violer la teneur de ces présentes, de notre absolution, érection, institution, application, disposition, indults, exemptions, libérations, suppositions, concessions, mandements, dérogations et largesses ; or, si quelqu'un présumait d'y attenter, qu'il sache qu'il encourra l'indignation de Dieu tout-puissant et des bienheureux Apôtres Saint Pierre et Saint Paul.
Donné à Rome, à Saint-Marc, l'an de l'incarnation de notre Seigneur 1608, le 16 février, et de notre pontificat l'an troisième.
On convient que l'institution des Ordres militaires est utile à la république chrétienne, et qu'ils servent à la défense et à la propagation de la foi catholique, si l'on prescrit aux Chevaliers de ces Ordres certaines règles de conduite, sous l'heureux auspice desquelles ils puissent bien vivre, combattre et surmonter les ennemis du nom chrétien.
I.
C'est pourquoi, ayant égard aux humbles prières qui nous ont été faites de la part de notre très-cher fils en Jésus-Christ, Henry, Roy de France, nous avons, il y a quelques jours, érigé et établi une Milice ou Ordre militaire pour la plus grande gloire de Dieu et de la très-glorieuse Vierge Marie, sa mère, et pour l'exaltation de l'Église Romaine, l'extirpation des hérésies ; composé de personnes nobles et d'une naissance distinguée de la nation française, sous le nom, le titre et la règle de la même très-glorieuse Vierge Marie, mère de Dieu, Notre-Dame du Mont-Carmel ; et afin que cette Milice, appuyée sur des règlements pieux et convenables, fasse continuellement et heureusement, selon nos désirs, des progrès religieux, nous lui donnons, à la prière du même Roi Henry, les règles suivantes.
II.
Les Chevaliers de ladite Milice feront leur profession de foi entre les mains du Grand-Maître, ou de celui qui sera député de sa part, selon les articles proposés par le Saint-Siège, et approuvés du temps de Pie IV ; laquelle profession ils signeront de leur main, pour être déposée dans les Archives de l'Ordre, entre les mains de celui qui sera préposé pour en prendre soin.
III.
Ils sont tenus de confesser leurs péchés sacramentalement, et de recevoir le très-saint Sacrement de l'Eucharistie, le jour qu'ils seront reçus dans l'Ordre, et avant que d'en prendre l'habit.
IV.
Ils porteront sur leurs manteaux une Croix de couleur brune, avec l'image de la Sainte Vierge dans le milieu, et une autre Croix d'or suspendue au col par un ruban de soie de même couleur, sur les deux côtés de laquelle sera l'image de la même Vierge.
V.
Ils feront à Dieu, à la glorieuse Vierge Marie et au Grand-Maître, vœu d'obéissance et de chasteté conjugale.
VI.
Ils combattront contre les ennemis de l'Église Romaine, toutes les fois que le Saint-Siège ou le Roy de France l'ordonnera audit Grand-Maître.
VII.
Ils réciteront tous les jours, avec la plus grande dévotion qu'ils pourront, l'Office ou la couronne de la bienheureuse Vierge Marie.
VIII.
Ils entendront la sainte messe tous les jours de fêtes et tous les samedis de l'année, s'ils ne sont pas légitimement occupés.
IX.
Et s'abstiendront les mercredis de chaque semaine de manger de la viande.
X.
Ils confesseront sacramentalement leurs péchés et recevront le très-saint Sacrement de l'Eucharistie toutes les fêtes de la sainte Vierge, principalement le jour de la fête de Notre-Dame du Mont-Carmel, qu'on a coutume de célébrer le 16 juillet.
XI.
Et ils s'assembleront le même jour dans le lieu qui leur sera assigné par le Grand Maître, pour célébrer dévotement, tous ensemble, ladite fête.
XII.
Ceux qui obtiendront les Commanderies qui seront fondées suivant la teneur des présentes, seront obligés de payer au Trésorier de l'Ordre les responsions et droits, à raison de leursdites Commanderies, ainsi qu'il se pratique par les Chevaliers des autres Milices.
XIII.
Et parce que les Chevaliers dudit Ordre doivent être sujets du Roy de France, selon leur établissement, ils ne pourront servir à la guerre sous un autre Chef ou Commandant, sans l'expresse permission de leur Grand-Maître, à peine d'être privés de l'habit de l'Ordre.
XIV.
Enfin nous ordonnons, statuons, mandons et commandons auxdits Chevaliers de garder et observer les règles contenues dans les présentes, nonobstant toutes Constitutions, Ordonnances apostoliques et autres choses contraires.
Donné à Rome, à Saint-Pierre, le 26 février, l'an de l'incarnation de Notre-Seigneur 1608, et le troisième de notre Pontificat.
Aujourd'hui, dernier jour d'octobre 1608, le Roy, étant à Fontainebleau, ayant fait expédier au sieur de Nérestang, Chevalier de son Ordre, mestre-de-camp de l'un de ses régiments entretenus, ses patentes en date du 4 avril dernier, par lesquelles Sa Majesté l'a fait et ordonné Grand-Maître de l'Ordre et Milice de la Vierge Marie, nouvellement institué en ce royaume par la Bulle de Notre Saint Père le Pape, du 14 des calendes du mois de mars 1608, comme il l'était auparavant de celui de Saint-Lazare de Jérusalem et Bethléem, tant deçà que delà les mers, pour ladite dignité de Grand-Maître dudit Ordre, nouvellement, comme dit est, établi, jouir et user par ledit sieur de Nérestang, ainsi qu'il est porté par lesdites lettres, et avec le pouvoir de faire dorénavant des Chevaliers, selon qu'il est contenu en ladite Bulle, qu'il pourra faire, quand bon lui semblera ; au moyen de quoi à l'avenir seront affectés les commanderies, prieurés, et autres bénéfices dudit Ordre de Saint-Lazare, qui sont en ce royaume, pays, terres et seigneuries de l'obéissance de sadite Majesté, aux Grand-Maître, Chevaliers et Officiers dudit Ordre de la Vierge Marie, pour icelles appréhender et posséder, quand elles leur écherront, tout ainsi que s'ils étaient ou avaient été faits Chevaliers dudit Ordre de Saint-Lazare. Et pourront, en outre, en conformité de la dite Bulle, jouir des pensions desquelles il plaira à Sa Majesté de les gratifier sur les évêchés, abbayes et autres bénéfices, même consistoriaux, qui sont en la nomination, collation, ou autre disposition de sadite Majesté, nonobstant qu'ils soient mariés : en témoin de quoi elle m'a commandé d'en expédier le présent brevet, qu'elle a voulu signer de sa main, et fait contresigner par moi secrétaire d'État et de ses commandements et finances.
Henry.
Par le Roy :
Brulard.
Henry, par la grâce de Dieu, Roy de France et de Navarre : au premier, notre huissier ou sergent sur ce requis, Salut.
Notre aimé et féal Chevalier de notre Ordre, mestre-de-camp d'un régiment de gens-de-pied français, et Grand-Maître des Ordres de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, Bethléem et Nazareth, tant deçà que delà des mers ; messire Philbert de Nérestang nous a fait remontrer qu'en la qualité de Grand-Maître dudit Ordre de Saint-Lazare, il a esgard sur toutes les commanderies, prieurés, biens et possessions, appartenances et dépendances dudit Ordre de Saint-Lazare, estant en et au dedans de notre royaume de France, pour l'entretenement dudit Ordre ; et d'autant qu'il est averti qu'en notre duché de Normandie il y a plusieurs gentilshommes et autres personnes qui se sont emparés de plusieurs commanderies et autres biens dépendants dudit Ordre, et en ont pris et perçu les cens et rentes ; ils continuent encore faire fruits et revenus, même s'en veulent attribuer la propriété, au grand préjudice dudit Ordre de Saint-Lazare : à cette occasion il désirerait en cette qualité de Grand-Maître, faire appeler par devant nos amés et féaux conseillers les gens tenant notre Grand-Conseil, tous ceux qui se trouveront avoir, tenir, posséder et jouir par usurpation, et sans titres valables, aucunes commanderies dudit Ordre, et d'icelles pris et perçu les fruits, revenus, biens et possessions qui en dépendent, pour en venir, rendre compte audit exposant, et en ce faisant apporter leurs titres et lettres en vertu desquels ils jouissent desdites commanderies et prieurés, et en prennent les fruits et revenus dépendant dudit Ordre de Saint-Lazare, ce qu'il craint ne pouvoir faire, sans avoir sur ce nos lettres à ce requises et nécessaires, qu'il nous a supplié et requis lui accorder. A ces causes, te mandons et commandons par ces présentes, qu'à la requête dudit exposant tu ajournes toutes les personnes qui se trouveront avoir, tenir, jouir et posséder lesdites commanderies et prieurés, fruits et revenus dépendant dudit Ordre en notre duché de Normandie et ailleurs, dont par l'exposant sera requis à être et comparoir à certain et compétent jour, par devant nosdits aimés et féaux conseillés les gens tenant notre grand-conseil auquel la connaissance en appartient, et que nous leur en avons de nouveau, en tant que besoin serait, commis et attribué, commettons et attribuons par ces présentes, et icelle interdite et défendue, interdisons et défendons à toutes nos autres cours et juges quelconques, pour rendre compte audit exposant de l'administration qu'ils ont eue des biens et revenus appartenant audit Ordre de Saint-Lazare, et en ce faisant apporter et faire apparoir de leurs titres, en vertu desquels ils possèdent lesdites commanderies et prieurés, et en prennent les fruits et revenus dépendants dudit Ordre ; pour ce fait être par ledit exposant, Grand-Maitre de l'Ordre de Saint-Lazare, pris communication d'iceux, et dire ce qu'il appartiendra ; autrement et à faute de ce faire, eux voir condamner en tous dépens, dommages et intérêts, et en outre procéder comme de raison. De ce faire, te donnons pouvoir, en certifiant notredit grand-conseil de ce que fait auras sur ce, auquel mandons faire auxdites parties ouyes, bonne et briefe justice, sans que tu sois tenu demander aucun congé, placet, visa ni pareatis ; nonobstant clameur et haro, chartre normande et lettres à ce contraires, auxquelles pour ce regard nous nous avons dérogé et dérogeons ; car tel est notre plaisir.
Donné à Fontainebleau, le vingt-neuvième jour de mai, l'an de grâce mil six cent neuf, et de notre règne le vingtième.
Henry.
Par le Roy, en son conseil :
De Loménie.
Et scellé du grand scel sur simple queue de cire jaulne.
Enregistré ès registres du Grand-Conseil du Roy, suivant l'ordonnance d'icelui, mise sur la requête présentée par l'impétrant.
A Paris, le cinquième juin mil six cent neuf.
Thiellement, avec paraphe.
Louis, par la grâce de Dieu, Roy de France et de Navarre : à tous présents et à venir, Salut.
Notre très-honoré seigneur et aïeul Henry-le-Grand, que Dieu absolve, bien informé de l'ancienne institution de l'Ordre et Chevalerie de Saint-Lazare de Jérusalem, tant deçà que delà les mers, le premier de l'église entre les militaires, pour combattre les ennemis de la foi et de la religion chrétienne, et de son établissement en ce royaume sous Louis VII, confirmé par Saint-Louis et ses successeurs, pour le soulagement et l'assistance des pauvres gentilshommes estropiés au service de l'État, et pour combattre auprès de la personne sacrée des rois de France, en avait conçu tant d'estime, que non-seulement il aurait renouvelé audit Ordre par plusieurs déclarations, les confirmations de tous les droits, biens, commanderies et privilèges qui y appartiennent, mais même obtenu en l'année 1607, de notre Saint Père le Pape Paul V, une bulle expresse, pour l'institution nouvelle d'un autre Ordre militaire dédié à la Sainte-Vierge sous le titre de Notre-Dame du Mont-Carmel ; lequel il aurait joint et uni à celui de Saint-Lazare de Jérusalem, avec pouvoir aux Grand-Maître, Commandeurs, Chevaliers et Officiers, de posséder les mêmes commanderies, prieurés et autres bénéfices dudit Ordre de Saint-Lazare, et de jouir des pensions qui leur seraient données sur toutes sortes de bénéfices consistoriaux, nonobstant qu'ils fussent mariés, conformément à ladite bulle qui commence par ces mots : Romanus pontifex. Et comme nous désirons pareillement faire connaître l'état que nous faisons desdits Ordres, et témoigner, en toutes occasions le zèle que nous avons pour la Religion, en qualité de Roy très-chrétien et de fils aîné de l'Église : ayant aussi une dévotion particulière envers la Sainte-Vierge, que nous avons prise pour patronne et protectrice de notre royaume, comme elle l'est desdits Ordres : et voulant imiter la piété d'Henri-le-Grand, notre très-honoré Seigneur et aïeul, et son affection pour favoriser un si saint établissement, si utile à la gloire de Dieu et au service de cet État. A ces causes, et pour autres bonnes considérations à ce nous mouvant, de nos grâce spéciale, pleine puissance et autorité royale, nous avons confirmé et confirmons par ces présentes signées de notre main, tous et un chacun les droits, biens, commanderies et privilèges accordés auxdits Ordres de Saint-Lazare de Jérusalem et de Notre-Dame du Mont-Carmel : voulons et nous plaît que lesdites déclarations de notre très-honoré Seigneur et aïeul Henri-le-Grand, et bulles de notre Saint-Père le Pape Paul V, et autres, soient exécutées selon leur forme et teneur. Ce faisant, que les Grand-Maître, Commandeurs, Chevaliers et Officiers desdits Ordres, jouissent pleinement et paisiblement de tous les droits, biens, privilèges et exemptions contenus èsdites déclarations et bulles ; comme aussi de tous les biens et commanderies qui leur appartiennent, sans qu'ils y puissent être troublés ni inquiétés par quelque occasion que ce soit. Si donnons en mandement à nos amés et féaux les gens tenant notre Grand-Conseil, que ces présentes ils aient à faire lire, publier et enregistrer ; et de leur contenu jouir et user lesdits Grand-Maître, Commandeurs, Chevaliers et autres Officiers desdits Ordres, pleinement et paisiblement, sans difficulté, cessant et faisant cesser tous troubles et empêchements à ce contraires ; car tel est notre bon plaisir : et afin que ce soit chose ferme et stable à toujours, nous avons fait mettre et apposé notre scel à cesdites présentes, sauf en autre chose notre droit, et l'autrui en toutes.
Donné à Paris, au mois d'avril, l'an de grâce mil six cent soixante-quatre, et de notre règne le vingt et unième.
Louis.
Par le Roy :
Phélypeaux.
Visa Séguier, pour servir aux lettres de confirmation des privilèges accordés aux Grand-Maître et Chevaliers de l'Ordre de Saint-Lazare.
Et scellé du grand sceau de cire verte, en lacs de soie rouge et verte.
Louis, Cardinal-Diacre du titre de Sainte-Marie in Portico, appelé de Vendôme, Légat a latere de Notre Saint Père le Pape Clément IX, et du Saint-Siège Apostolique, etc., pour perpétuelle mémoire de la chose.
Les devoirs de la légation apostolique qui nous a été accordée par une grâce spéciale du Saint-Siège, exigent que nous nous appliquions de toutes nos forces aux choses que l'on croit utiles à la république chrétienne, et avantageuses à la propagation de la foi, et que nous versions libéralement nos grâces sur les fidèles qui exposent généreusement leur vie sous les enseignes de la Croix, pour la conservation de cette même république chrétienne, et pour le service des pauvres et des malades. Nos bien-aimés en Jésus-Christ, Charles-Achille de Nérestang, Grand-Maître des Ordres Royaux, Hospitaliers et Militaires de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, tant deçà que delà les mers, les Prieurs, Commandeurs et les autres Frères Chevaliers desdits Ordres, nous ont fait représenter que l'Ordre Militaire de Saint-Lazare de Jérusalem, créé dans l'Orient, dès le temps du Pape saint Damase et de saint Basile le Grand, et ensuite confirmé par plusieurs souverains Pontifes, ainsi que l'assure le Pape Pie IV, dans la Bulle qui commence Inter assiduas, fut d'abord établi en France par le Roi Louis VII ; que dans la suite des temps, saint Louis estimant singulièrement ce même Ordre, le confirma et le destina à servir et soulager les soldats estropiés, les pauvres gentilshommes, les lépreux, à défendre les pèlerins et à leur donner l'hospitalité ; et qu'enfin cet Ordre fût réformé, suivant les décrets du Concile de Trente, par le Pape Pie V, d'heureuse mémoire, selon ses lettres en forme de Bulle, qui commencent, Sicuti bonus Agricola, en date du 7 des calendes de février 1567.
De plus, les susdits Grand-Maître et Chevaliers nous ont représenté que le Pape Paul V, de fraîche mémoire, érigea et institua par ses Lettres en forme de Bulle, qui commencent, Romanus Pontifex, données à Rome, à Saint-Marc, le 16 février 1608, à l'instante prière de Henri IV, pour lors Roi très-chrétien de France et de Navarre, qui avait une dévotion très-particulière à la très-sainte Vierge mère de Dieu, une Milice ou Ordre Militaire, sous le titre, la dénomination et la règle de Notre-Dame du Mont-Carmel, auquel il attribua et concéda plusieurs singulières grâces, privilèges et indults, en faveur des personnes nobles et d'une naissance distinguée de la nation française qui entreraient dans ledit Ordre, pour la défense et pour l'exaltation de l'Église, et la destruction des hérésies ; et afin que ladite Milice ou Ordre se conservât, et fût soutenue par des règles particulières et par des statuts convenables, le même Pape Paul V, à la prière du même Roi Henri IV, fit et accorda par ses autres Lettres, qui commencent, Militantium Ordinum institutio, données à Rome, à Saint-Pierre, le 26 février de la même année, certaines règles particulières à ceux qui seraient reçus à l'avenir dans cette Milice ; ensuite le susdit Roi Henri, pour certaines raisons, et peut-être dans la crainte que, laissant subsister ces deux Ordres séparément, l'un ne portât envie à l'autre, ce qui pourrait faire naître des difficultés entre eux, joignit et réunit pour toujours, de son autorité royale, l'un et l'autre Ordre Militaire de la bienheureuse Vierge Marie de Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, par un acte et brevet du dernier octobre 1608, laquelle jonction et union le Sérénissime Prince Louis XIV, présentement Roi de France et de Navarre, a confirmé par ses lettres patentes du mois d'avril 1664 ; En outre, les mêmes suppliants nous ont représenté que les Souverains Pontifes, de leur libéralité et bénignité, avoient accordé et attribué plusieurs privilèges particuliers, grâces, et indults, soit à l'Ordre de Saint-Lazare de Jérusalem, soit à celui de la bienheureuse Vierge Notre-Dame du Mont-Carmel, tant par les susdites Bulles de leur institution, que par celles qui dans la suite les ont confirmées ; et qu'ayant tout lieu de craindre que par le laps de temps et la vétusté, ces mêmes privilèges ne vinssent à diminuer et à périr, ils désireraient de faire revalider et fortifier de l'autorité apostolique lesdites institutions, règles, privilèges, indults et prérogatives, données et concédées tant auxdits Ordres qu'aux Frères Chevaliers d'iceux, par les susdites Bulles : Nous donc, selon les devoirs que nous impose la légation apostolique, approuvant libéralement les pieux désirs des personnes religieuses, et particulièrement ceux de la fervente dévotion de nos Chevaliers, et désirant seconder les louables intentions des Rois Henri et Louis, et favoriser de grâces spéciales le Grand-Maître et les autres Frères Chevaliers ; absolvant et tenant pour absous chacun d'eux, à l'effet des présentes, de toutes sentences d'excommunication, suspension, interdiction, et autres censures et peines ecclésiastiques, qui pourraient être portées contre eux par le droit ou par les hommes, s'il s'en trouve liés à quelque occasion, et par quelques causes que ce soit ; et condescendant à leur demande ; à ce suffisamment autorisé par les lettres du Saint Siège, que nous ne sommes pas tenus d'insérer ici ; ayant attentivement examiné tout ce qui nous a été dit et exposé, et après avoir approuvé la louable et noble institution des susdits Ordres, nous ; de l'autorité apostolique que nous exerçons en cette partie, approuvons et confirmons par les présentes l'union desdits deux Ordres, faite comme il a été dit, par l'autorité royale, leurs règles, privilèges, possessions, facultés, concessions, exemptions, droits, prérogatives, prééminences, grâces, faveurs, indults, licites toutefois et honnêtes, qui leur ont été légitimement concédés, respectivement ou ensemble, par les Bulles susdites et autres ; nous les revalidons et fortifions de l'inviolable autorité apostolique : Déclarant ces présentes devoir être pour toujours valides, fermes, efficaces, sortir et obtenir leur plein et entier effet ; et que tous juges ordinaires et délégués, même les auditeurs des causes du palais apostolique ; et enfin tous ceux à qui il appartient ou appartiendra ou pourra appartenir, seront obligés de donner leurs suffrages, de juger et définir pleinement en toutes choses et sur toutes les affaires desdits Ordres, conformément à la teneur des présentes, et que s'il arrivait à quelques-uns d'aller au contraire, par quelque autorité que ce soit, nous déclarons, dès à présent, tout ce qu'ils feront nul et de nul effet ; nonobstant toutes constitutions, ordonnances, privilèges et indults et lettres apostoliques, concédées en quelque manière que ce puisse être, même confirmées et renouvelées, auxquelles, par ces présentes, nous avons dérogé spécialement et expressément, en général et en particulier, et à toutes autres lettres que ce puisse être, à ce contraires, dont nous déclarons la teneur pour suffisamment et de mot en mot insérée dans les présentes, quoique d'ailleurs elles demeurent dans leur force.
Donné à Paris, le cinq de juin, l'an de l'incarnation de notre Seigneur 1668, et le premier du pontificat de Notre Saint-Père le Pape.
Le cardinal de Vendôme, Légat.
C. De Lionne, Proto-notaire Apostolique Dataire.
A. de Massac, Sous-dataire.
L. de la Foucherie, R. S.
Louis, par la grâce de Dieu, Roy de France et de Navarre, Dauphin de Viennois, Comte de Valentinois et Dijois, Comte de Provence, Forcalquier et terres adjacentes, à tous présents et à venir, Salut.
Depuis qu'ayant plu à Dieu de nous appeler à cette couronne, nous avons pris nous-mêmes le soin du gouvernement de l'État, nous n'avons rien eu en plus forte recommandation que de pourvoir au repos et à la tranquillité de nos peuples, et à rétablir toutes choses dans un si bon ordre au-dedans, que nous fussions en état non seulement d'y conserver le calme, mais aussi de nous faire craindre au-dehors, et de pouvoir par la force de nos armes nous opposer à tout ce que l'on voudrait entreprendre pour le troubler, n'ayant omis aucun soin de ceux que nous avons cru nécessaires pour parvenir au comble d'un si grand bonheur. Et ayant considéré qu'il était bien raisonnable de songer à la récompense et au soulagement de ceux qui ont été les principaux instruments d'un si grand ouvrage, et qui dans la suite du temps serviront à le maintenir et conserver, et qu'il ne serait pas juste d'abandonner les officiers et soldats de nos troupes aux misères qui accompagnent ordinairement ceux qui ayant consumé tout leur bien et leur âge à nous servir dans nos armées, et à la défense de nos places, se trouvent hors d'état par caducité, ou par les incommodités que les blessures qu'ils ont reçues, leur causent, de pouvoir subvenir à leurs besoins, et d'être réduits, comme on en a vu plusieurs, à une honteuse mendicité ; ce qui est un exemple d'autant plus dangereux, qu'il abat le cœur, et ôte le courage à beaucoup de gens qui prendraient parti dans nos troupes, et nous serviraient utilement et l'État, s'ils n'en étaient retenus par l'appréhension de tomber dans de pareilles disgrâces. Ces considérations nous ayant porté à former le dessein d'établir un hôtel, pour y recevoir et entretenir les officiers et soldats invalides de nos troupes, et de pourvoir au fonds nécessaire pour les y faire subsister, à l'exemple de ce qui avait été projeté par le feu Roy notre très-honoré Seigneur et Père de glorieuse mémoire, pour l'érection de la commanderie de S. Louis, ce qui n'a pas été exécuté : nous aurions pour cet effet ordonné la construction d'un hôtel magnifique, proche et au-dessous de notre bonne ville de Paris, auquel nous faisons travailler incessamment, et que nous espérons dans peu être dans sa perfection ; et nous aurions en même temps affecté pour la subsistance des officiers et soldats invalides qui y pourront être reçus, le fonds des pensions établies sur les abbayes et prieurés de notre Royaume, pour les religieux lais, et encore un autre fonds considérable pour leur subsistance. Mais ayant aussi considéré qu'il était de notre dignité de soutenir les officiers de nos troupes, qui par leur naissance et par les longs services qu'ils nous ont rendus et à l'État, doivent être distingués du commun, en leur procurant des avantages, et leur donnant des récompenses proportionnées au mérite des belles actions qu'ils ont faites ; après avoir sur cela recherché plusieurs moyens, nous n'en avons point trouvé de plus convenable, et qui fût moins à la charge de nos finances et de nos peuples, que d'affecter des biens et revenus de quelque ancien Ordre dans l'église et dans notredit Royaume, desquels nous puissions disposer pour donner des pensions ou des commanderies aux gentilshommes et officiers de nos troupes, qui auront bien mérité de nous et du public, et qui par des services signalés s'en seront rendus dignes. Et sachant que l'Ordre de S. Lazare de Jérusalem est le plus ancien de la chrétienté, qu'il est hospitalier et militaire, qu'il est fondé pour la défense de la foi, le service des malades et des pauvres, et qu'il a été doté de biens suffisants pour l'exécution de notre dessein, la plus grande partie desquels a été usurpé sur lui par l'envie et l'avidité de plusieurs autres Ordres séculiers et réguliers, communautés et particuliers : considérant aussi les soins que les Rois Louis VII et S. Louis ont pris d'amener de la Terre Sainte en France, le grand maître des chevaliers dudit Ordre, auxquels ils ont donné l'entière direction et administration de toutes les maladreries, hôpitaux et lieux pieux du Royaume, ensemble plusieurs maisons, terres, possessions, et entre autres la commanderie de Boigny, dans laquelle le chef-lieu et commanderie principale du grand maître dudit Ordre, tant deçà que delà les mers, a été depuis perpétuellement reconnue, lesquelles possessions ont été beaucoup augmentées dans la suite des temps, par la piété des Rois nos prédécesseurs, princes et autres, qui ont fait donation audit Ordre de quantité de terres et biens, pour le mettre en état de satisfaire aux devoirs de son institution, comme aussi les grands et notables privilèges que les Papes lui ont accordés par leurs Bulles : voulant à l'imitation et suivant l'exemple du Roy Henry IV notre aïeul, en exécutant le dessein qu'il avait de donner à la noblesse, et aux autres officiers et soldats de nos armées, des récompenses certaines et honorables, par le moyen des biens et privilèges dudit Ordre ; et étant informé de l'affection particulière qu'il avait pour son entier rétablissement, comme aussi de l'union qui a été faite sous son règne en l'année 1608 de l'Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel à celui de S. Lazare de Jérusalem, au moyen de quoi lesdits deux Ordres n'en composent plus qu'un, avec les mêmes privilèges aux chevaliers de posséder ; quoique mariés, des pensions sur toutes sortes de bénéfices : lesquels privilèges nous aurions depuis approuvés par plusieurs déclarations et arrêts de notre Conseil, et notamment par notredit Édit, du mois d'avril 1664 registré en notre Grand Conseil, lesquels ont été confirmés par la Bulle de notre cousin le cardinal de Vendôme, légat a latere vers nous du Pape Clément IX en date du mois de juin 1668 sur laquelle nous avons fait expédier nos lettres patentes, registrées tant en notredit Grand Conseil, qu'en plusieurs cours souveraines de notre Royaume. Et comme nous avons reconnu les grands abus et malversations que ceux qui ont été proposés à l'administration des maladreries, léproseries, aumôneries, et autres lieux pieux, ont exercés et exercent journellement au préjudice des pauvres, et même que divers Ordres réguliers, hospitaliers et militaires, qui possédaient de grands biens dans notre Royaume, se trouvent éteints et abolis ; désirant donner des marques du zèle que nous avons pour la religion, en qualité de fils ainé de l'Église, et de l'estime que nous faisons dudit Ordre de S. Lazare de Jérusalem, et de Notre-Dame du Mont-Carmel, lequel nous voulons non seulement rétablir et confirmer dans tous ses biens et privilèges anciens et nouveaux, mais encore les augmenter, pour du revenu de ses biens, en composer des commanderies, qui puissent servir de récompenses honorables et utiles pour toute la noblesse de notre Royaume, et les officiers et soldats qui nous auront bien servi dans nos armées : Savoir faisons, que pour ces causes et autres bonnes et justes considérations à ce nous mouvans, après avoir fait mettre cette affaire en délibération en notre Conseil, de l'avis d'icelui et de notre certaine science, pleine puissance et autorité royale, nous avons par cet Édit perpétuel et irrévocable, confirmé et confirmons audit Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel et de S. Lazare de Jérusalem, tous et chacun des biens, droits, privilèges et maladreries, léproseries et commanderies, prieurés, hôpitaux et autres lieux et bénéfices qui leur appartiennent, suivant et conformément à nos lettres et déclarations, et de nos prédécesseurs Rois, Bulles des Papes, et de leurs légats en notre Royaume ; accordées respectivement auxdits Ordres, conjointement ou séparément, et toutes autres facultés, privilèges, exemptions, prérogatives et prééminences qui y appartiennent de droit, ou par concession audit Ordre, grand maître, commandeurs, chevaliers et officiers d'icelui en ladite qualité ; même la faculté de tenir par eux, quoique mariés, des pensions sur toutes sortes de bénéfices réguliers ou séculiers, soit qu'ils se les soient réservées, ou qu'elles soient accordées devant ou après avoir fait profession dans ledit Ordre. Et à cet effet nous faisons de nouveau audit Ordre, et en tant que besoin est ou serait, tous dons, concessions, et rétablissements à ce nécessaires, révoquant toutes donations et concessions, qui se trouveront avoir été faites desdits biens, tant par nous que par nos prédécesseurs Rois, à toutes communautés séculières ou régulières, de quelque Ordre que ce soit ou autres personnes, et pour quelque cause et occasion que c'ait été. Et pour d'autant plus favoriser ledit Ordre, et le rendre considérable, nous de la même autorité que dessus avons concédé et uni, concédons et unissons audit Ordre l'administration et la jouissance, générale, perpétuelle et irrévocable, de toutes les maisons, droits, biens et revenus, ci-devant possédés par tous autres Ordres, hospitaliers, militaires, séculiers ou réguliers, éteints, supprimés, et abolis, de fait ou de droit, dans notre Royaume, et terres de notre obéissance, spécialement les Ordres du S. Esprit de Montpellier, de S. Jacques de l'Épée, et de Lucques, du S. Sépulcre, de Sainte-Christine du Somport, de Notre-Dame dite Teutonique, de S. Louis de Boucheraumont, et autres ; lesquels Ordres nous avons en tant que besoin est ou serait déclarés éteints, supprimés et abolis, et les biens d'iceux vacants unis et incorporés, comme dit est, audit Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel et de S. Lazare, sans que lesdits Ordres ainsi supprimés puissent être à l'avenir rétablis pour quelque cause que ce soit. Et par une plus ample grâce nous concédons pareillement et unissons auxdits Ordres de Notre-Dame du Mont-Carmel et de S. Lazare de Jérusalem, l'administration et jouissance perpétuelle et irrévocable de toutes les maladreries, léproseries et commanderies, ensemble tous les hôpitaux, hôtels-Dieu, maisons-Dieu, aumôneries, confréries, chapelles hospitalières, et autres lieux pieux de notre Royaume, et terres de notre obéissance, soit qu'ils soient possédés en titre de bénéfices, ou simples administrations, où l'hospitalité n'est, ou n'a pas été ci-devant gardée suivant les conditions de leur fondation, de quelque nature, qualité, fondation, présentation, disposition, et collation qu'ils soient, sans que ledit Ordre soit tenu d'en rendre aucun compte par-devant les juges des lieux, et tous autres, dont nous l'avons dispensé et dispensons par ces présentes ; pour lesdits biens et revenus ainsi réunis audit Ordre de Notre-Dame de Mont-Carmel et S. Lazare, en être par nous formé des commanderies, desquelles nous et nos successeurs Rois entendons avoir en qualité de chef souverain dudit Ordre, l'entière et pleine disposition en faveur des officiers, soldats de nos troupes, qui se seront fait admettre dans ledit Ordre, et sur icelles y affecter telles pensions qu'elles pourront et devront porter, pour en gratifier d'autres officiers. Voulons aussi et entendons que sur lesdites commanderies soient pris par forme de responsion et contribution, les deniers nécessaires pour aider et subvenir à l'entretenement des hôpitaux de nos armées et places frontières, où seront reçus tous officiers et soldats blessés et malades, ayant jugé cette application plus conforme aux intentions des fondateurs des lieux pieux, à présent qu'il y a presque plus de lépreux dans le Royaume. Voulons néanmoins que ceux qui se trouveront encore atteints de cette maladie, soient logés tous dans un même lieu, et entretenus aux dépens dudit Ordre, suivant l'institution d'icelui. Et comme au moyen de la réunion de tous lesdits biens et revenus, et de la disposition par nous ordonnée d'iceux, il est nécessaire qu'ils soient reçus et administrés par ceux qui seront préposés à cet effet par ledit Ordre, nous avons révoqué et révoquons tous les administrateurs à temps et à vie des lieux susdits, nonobstant tous arrêts de maintenue donnés à leur profit, auxquels administrateurs nous enjoignons de remettre incessamment ès mains des procureurs dudit Ordre, les titres, déclarations et papiers étant par-devers eux, touchant la consistance et revenus desdits biens : ensemble les baux à ferme d'iceux, et les états de la recepte et dépense de leur administration depuis vingt-neuf ans ; et les quittances qui leur seront données par lesdits procureurs, en fin de l'inventaire qui sera fait des titres et papiers qui leur seront remis, vaudront de bonnes et valables décharges auxdits administrateurs, pour le tout être mis et déposé dans les archives dudit Ordre : à peine à ceux qui manqueront d'y satisfaire, quinzaine après le commandement qui en sera fait, de quinze cents livres d'amende, et d'y être contraints par toutes voies comme dépositaires de biens de justice, en vertu du présent Édit, nonobstant oppositions ou appellations quelconques, pour lesquelles ne sera différé. Voulons en outre que ledit Ordre soit mis en possession et saisine, tant des biens, commanderies, aumôneries, maladreries, prieurés, chapelles et autres lieux qui leur appartiennent, suivant et conformément auxdites déclarations, Bulles des Papes, et notre présent Édit, que des autres maisons, hôpitaux et lieux par nous concédés et unis audit Ordre ; et que tous possesseurs, détenteurs et usurpateurs desdits biens, lieux et revenus en dépendant, soient contraints par toutes voies dues et raisonnables, d'en laisser la libre possession et jouissance, avec restitution des fruits au profit dudit Ordre, jusques et depuis vingt-neuf années, s'il y échoit, et sur les titres, fondations anciennes, reconnaissances, marques et preuves naturelles, résultantes de la description de l'état des lieux, et de notoriété, enquêtes faites et à faire, et preuves par témoins, extraits des greffes, archives, dépôts publics, papiers de compoix, cadastres, parcellaires, lieues, terriers, et autres titres qui seront rapportés par ledit Ordre : lequel au moyen d'iceux nous voulons et ordonnons être maintenu, tant par provision, que définitivement en la possession et jouissance des lieux susdits, nonobstant tous laps de temps, décrets, possessions, et prétendues prescriptions, même centenaires, dons, concessions, unions de nous confirmées par lettres patentes, même registrées dans nos cours souveraines, pensions, échanges, albergues, inféodations, arrentements, baux emphytéotiques, et autres à moindres années, reconnaissances postérieures, à d'autres qu'auxdits hôpitaux et lieux susdits, et généralement tous autres titres, sous lesquels lesdits lieux et biens sont présentement détenus, possédés et usurpés : tous lesquels titres nous déclarons de nulle force et valeur, sous quelque prétexte qu'il aient été passés, ou obtenus de nous, ou des Rois nos prédécesseurs, et consentis en faveur des communautés ecclésiastiques ou laïques, séculières ou régulières, nonobstant aussi tous dons et unions du total, ou partie du revenu des hôpitaux et autres lieux pieux de la qualité susdite, faits à aucuns bénéfices réguliers ou séculiers, même à des communautés et érections desdits lieux pieux en bénéfices simples ou conventuels, en quelque manière que ce soit, et toutes collations qui s'en seraient ensuivies : lesquels dons, unions, érections et collations nous avons déclaré et déclarons pareillement nulles, de nulle force et valeur. Comme aussi voulons et entendons que tous les Édits, déclarations, et arrêts donnés en faveur des pauvres gentilshommes, soldats estropiés, et pour la recherche des biens des hôpitaux, soient exécutés, comme s'ils avaient été donnés en faveur dudit Ordre, et si lesdits Édits et déclarations expédiées en faveur des pauvres gentilshommes, et soldats estropiés étaient ci-insérées de mot à mot ; et ce pour le regard des choses qui ne sont point contraires à ce qu'il est porté par le présent Édit, et par notre déclaration du mois de janvier 1670 concernant les religieux lais. Et pour l'entière et parfaite exécution du présent Édit, et connaître de tous les procès et différends, qui naitront pour raison de toutes les choses y contenues, nous avons résolu d'établir une Chambre composée d'officiers des plus considérables de notre Conseil, en laquelle Chambre lesdits procès et différends seront jugés et terminés en dernier ressort, et à laquelle nous donnerons pouvoir d'enregistrer toutes déclarations et arrêts, faire des règlements tels qu'elle jugera à propos et subdéléguer, si besoin est, tant en matière civile que criminelle ; et durera ladite Chambre tout le temps que nous estimerons nécessaire et à propos pour le bien des affaires dudit Ordre, de la maintenir et conserver, nous réservant de la révoquer et supprimer, lorsque bon nous semblera. Après laquelle suppression, nous voulons et entendons que tous les procès qui resteront pendants en icelle, et toutes les causes et matières dont nous lui attribuons la connaissance, qui concerneront ledit Ordre de S. Lazare, tant en demandant qu'en défendant, soient renvoyées en notre Grand Conseil. Et comme au moyen de l'établissement de ladite Chambre, celle de la générale réformation érigée en l'année 1612 sera inutile, nous avons ladite Chambre de la générale réformation révoquée et supprimée, révoquons et supprimons par ce présent Édit, avec défense aux officiers qui la composent, de s'immiscer à l'avenir, ni de connaître des matières qui lui avaient été attribuées, et dont la connaissance appartiendra à ladite Chambre, qui sera établie en conséquence du présent Édit. Voulons que tous les actes, titres, registres et papiers étant en ladite Chambre de la réformation, soient remis incessamment ès mains de celui qui sera commis par ledit Ordre pour les recevoir, lequel s'en chargera par inventaire, pour être par lui déposés ès archives dudit Ordre. Si donnons en mandement à nos aimés et féaux conseillers les gens tenant notredit Grand Conseil, que le présent Édit ils fassent lire, publier et registrer, et le contenu en icelui inviolablement entretenir, garder et observer, nonobstant toutes coutumes, édits, déclarations, arrêts, jugements, concessions, brevets, dons, permissions, lettres patentes registrées en nosdites cours souveraines, même toutes lettres d'État obtenues et à obtenir, que nous voulons n'avoir aucun effet pour ce que dessus, et autres lettres à ce contraires, auxquelles et aux dérogatoires des dérogatoires y contenues nous avons dérogé et dérogeons par ces présentes. Et d'autant que l'on en pourra avoir besoin en différents lieux, voulons qu'aux copies d'icelles dûment collationnées par l'un de nos aimés et féaux conseillers et secrétaires, foi soit ajoutée comme à l'original : car tel est notre plaisir. Et afin que ce soit chose ferme et stable à toujours, nous avons fait mettre et apposer notre scel à cesdites présentes, sauf en autre chose notre droit et l'autrui en toutes.
Donné à S. Germain-en-Laye au mois de décembre de l'an de grâce 1672, et de notre règne le trentième.
Louis.
Par le Roy Dauphin, Comte de Provence :
Phélypeaux.
Et scellé de cire verte, et à côté Visa, D'Aligre.
Enregistré ès registres du grand Conseil du Roy, suivant l'arrêt ce jourd'hui donné en icelui à Paris, le 20 jour de février 1673.
Herbin.
Lu, publié et enregistré, ouï et ce requérant le procureur général du Roy, pour être exécuté selon sa forme et teneur, et copies collationnées envoyées aux bailliages, sénéchaussées, sièges présidiaux et autres juridictions du Royaume, pour y être pareillement lu, publié et registré à la diligence des procureurs du Roy esdits sièges, qui seront tenus de certifier avoir ce fait dans deux mois. A Paris à l'Arsenal, le 25 février 1673.
Macé.
Louis, par la grâce de Dieu, Roy de France et de Navarre : à tous présents et à venir, Salut.
Nous aurions par notre Édit du mois de décembre 1672 et par nos Lettres de déclaration des 24 mars 1674, avril 1675 et septembre 1682 pour les causes y contenues, confirmé à l'Ordre de Notre-Dame de Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, tous et chacun les biens, droits, privilèges, maladreries, léproseries, commanderies, prieurés, hôpitaux et autres lieux et bénéfices qui leur appartiennent, avec toutes les facultés, exemptions, prérogatives et prééminences à eux accordées, et Nous aurions en outre concédé audit Ordre l'administration et jouissance perpétuelle des maisons, droits, biens et revenus ci-devant possédés par d'autres Ordres hospitaliers, militaires, séculiers ou réguliers, ensemble de toutes les maladreries, léproseries, hôpitaux, maisons-Dieu, aumôneries, confréries, chapelles hospitalières, et autres lieux pieux de notre Royaume où l'hospitalité n'était pas gardée ; même ceux fondés pour les pèlerins et pauvres-passants, aux clauses, charges, conditions et exceptions y mentionnées, desquels lieux, biens et droits réunis audit Ordre par nosdits Édits et Déclarations, et par les jugements de notre Chambre royale de l'Arsenal, rendus en conséquence, il aurait été composé des grands prieurés et commanderies, dont plusieurs officiers de nos troupes de terre et de mer auraient été pourvus. Mais après avoir fait examiner en notre présence nosdits Édits et Déclarations des mois de décembre 1672, mars et avril 1674, avril 1675 et septembre 1682 et tout ce qui s'est fait en exécution, Nous avons reconnu que l'union portée par notre Édit du mois de décembre 1672 des biens de plusieurs Ordres hospitaliers et militaires, n'apportait presque aucune utilité aux officiers de nos troupes, qui en jouissent à titre de commanderie, et les engageait à des procès inévitables ; que l'union des maladreries, léproseries et hôpitaux leur étaient fort à charge, tant par le grand nombre des petites pièces d'héritages éparses en divers endroits fort éloignés les uns des autres, dont les grands prieurés et commanderies sont composés, que par l'obligation d'y faire faire les réparations, et d'en soutenir les droits souvent contestés par les redevables et par les possesseurs des héritages voisins et contigus, choses auxquelles les officiers de nos troupes actuellement occupés au service qu'ils nous rendent dans nos armées, ne peuvent pas vaquer, et dont néanmoins l'abandonnement causerait dans la suite la ruine desdits biens ; qu'enfin il était beaucoup plus convenable de leur donner d'autres biens et revenus d'une facile perception, qui ne les engageassent à aucuns soins, diligences ni embarras. D'un autre côté, Nous aurions aussi considéré que les Ordres hospitaliers et militaires dont nous avons unis les biens audit Ordre de Mont-Carmel et de S. Lazare, ne pouvant être regardés comme entièrement éteints, il serait juste de leur rendre lesdits biens et revenus, sauf à être pourvu à la réformation des abus qui s'y sont glissés, et que nous ne pouvions rien faire de plus digne de la justice et de la charité dont nous tâchons de remplir le devoir, que de laisser le revenu des hôpitaux, même de ceux, ou par la négligence des administrateurs, et autres qui en étaient chargés, l'hospitalité n'était point gardée, pour être employé à la subsistance des pauvres des lieux, suivant l'esprit et l'intention des fondateurs, en y établissant une bonne administration pour l'avenir ; et à l'égard des maladreries et léproseries, que la maladie de la lèpre au soulagement de laquelle elles ont été destinées, étant presque entièrement cessée dans notre Royaume, il était de notre devoir, non seulement comme Roy, mais encore comme fondateur de la plus grande partie de ces établissements, d'en faire et procurer l'application et conversion à quelqu'autres usages également utiles pour notre État et pour le public, et conformes autant qu'il se pourra à l'esprit de leur fondation, sans néanmoins que par le changement des destinations que nous avons résolu de faire des biens desdits Ordres, et de ceux des hôpitaux, maladreries et léproseries, nous entendions priver les officiers de nos troupes pourvus des grands prieurés et commanderies dudit Ordre de Notre-Dame de Mont-Carmel et de S. Lazare, de l'effet des grâces que nous leur avons faites, desquelles notre intention est non seulement de les dédommager, mais encore de leur faire paraître de plus en plus, et aux autres officiers de nos troupes de terre et de mer par de nouvelles récompenses, la satisfaction que nous avons de leur fidélité et de leur zèle pour notre service, sur quoi nous nous réservons de déclarer incessamment notre intention.
A ces causes, de l'avis de notre Conseil, et de notre certaine science, pleine puissance et autorité Royale, Nous avons par le présent Édit perpétuel et irrévocable, désuni et désunissons par ces présentes dudit Ordre de Notre-Dame de Mont-Carmel et de S. Lazare, les maisons, droits, biens, et revenus qui étaient possédés avant notre Édit du mois de décembre 1672 par les Ordres du Saint-Esprit de Montpellier, de S. Jacques de l'Épée et de Lucques, du S. Sépulcre, de Sainte-Christine du Somport, de Notre-Dame dite Teutonique, de S. Louis de Boucheraumont, et autres Ordres hospitaliers, militaires, séculiers, ou réguliers. Avons pareillement désuni dudit Ordre de Notre-Dame de Mont-Carmel et de S. Lazare, les maladreries et léproseries, hôpitaux, hôtels-Dieu, maisons-Dieu, aumôneries, confréries, chapelles hospitalières, et autres lieux pieux de notre Royaume, même ceux destinés pour les pèlerins ou pauvres passants unis audit Ordre de S. Lazare par notre Édit du mois de décembre 1672 et déclarations intervenues en conséquence, soit que lesdits hôpitaux ou lieux pieux fussent possédés en titre de bénéfices, ou de simples administrations ; et encore que l'hospitalité n'y eût été gardée, desquels biens et revenus desdits Ordres, maladreries, léproseries, hôpitaux, et autres lieux pieux et droits en dépendant, les pourvus des grands prieurés et commanderies auxquels ils ont été attachés, seront tenus de quitter et délaisser la possession et jouissante en l'état où ils sont, et d'en remettre les baux et titres qu'ils ont par-devers eux au premier jour de juillet prochain à ceux qui seront à ce commis et préposés par les intendants et commissaires départis dans les provinces de notre Royaume pour l'exécution de nos Ordres, sans que lesdits commis et préposés puissent déposséder les fermiers ; et sans que les pourvus desdits grands prieurés et commanderies puissent cependant détériorer les lieux, couper les bois, ni emporter ou enlever aucunes choses que les meubles servant à leur usage, à peine d'en répondre, et d'être privés du dédommagement que nous avons résolu de leur accorder, ainsi qu'il sera dit ci-après. Voulons que les biens et revenus possédés avant notredit Édit du mois de décembre 1672 par lesdits Ordres du Saint-Esprit, et autres ci-dessus nommés, leur soient rendus et restitués : auquel effet, lesdits Ordres se pourvoiront par-devant les commissaires qui seront par Nous députés pour l'exécution de notre présent Édit ; et en vertu des jugements qu'ils en obtiendront, ils seront rétablis et réintégrés en la possession et jouissance desdits biens : lesquels en conséquence leur seront remis par lesdits commis et préposés ; sauf à être pourvu dans la suite à la réformation desdits Ordres, ainsi qu'il appartiendra. Et à l'égard des biens et revenus desdits hôpitaux et autres lieux de la même qualité, Nous voulons qu'ils soient employés à secourir les pauvres et malades des lieux, ainsi qu'il sera par Nous ordonné sur les avis qui nous seront sur ce envoyés par les sieurs archevêques et évêques de notre Royaume, et par les sieurs intendants et commissaires départis. Et quant auxdites maladreries et léproseries, Nous nous réservons d'en faire et procurer l'union à quelqu'autre établissement, ou d'y pourvoir autrement, ainsi que nous le jugerons à propos, après avoir examiné l'emploi le plus utile qui pourra en être fait. N'entendons néanmoins comprendre au présent Édit les biens, droits, commanderies, prieurés, hôpitaux, et autres lieux et bénéfices dont ledit Ordre de Notre-Dame de Mont-Carmel et de Saint-Lazare était en possession avant notredit Édit du mois de décembre 1672 dans lesquels nous voulons qu'il soit maintenu et conservé ; ensemble dans tous les privilèges, facultés, exemptions, prérogatives et prééminences accordés audit Ordre, tant par nos lettres et déclarations et celles des Rois nos prédécesseurs, que par les bulles de nos Saints Pères les Papes, en ce qu'elles ne sont point contraires aux saints décrets et constitutions canoniques, à nos ordonnances, aux libertés de l'église gallicane, et aux arrêts et règlements de nos cours ; Nous réservant de pourvoir au dédommagement des officiers de nos troupes pourvus de grands prieurés, et commanderies dudit Ordre de Notre-Dame de Mont-Carmel et de S. Lazare, et de remplacer par d'autres biens et revenus dont ils jouiront, à commencer du premier juillet prochain, ceux que nous avons désunis par notre présent Édit ; dérogeant entant que besoin serait à tous Édits et déclarations contraires, et notamment audit Édit du mois de décembre 1672 et autres Édits et déclarations données en conséquence : ensemble à tous arrêts de réunion, transactions, traités, concordats, et autres actes intervenus depuis, ou en vertu de notredit Édit du mois de décembre 1672 lesquels nous avons révoqué et révoquons par ces présentes.
Si donnons en mandement à nos aimés et féaux conseillers les gents tenant notre Grand-Conseil, que le présent Édit ils aient à faire lire, publier et registrer, et le contenu en icelui garder et observer selon sa forme et teneur, sans souffrir qu'il y soit contrevenu en quelque sorte et manière que ce soit : car tel est notre plaisir. Et afin que ce soit chose ferme et stable à toujours, Nous y avons fait mettre notre scel.
Donné à Versailles au mois de mars de l'an de grâce mil six cents quatre-vingt-treize, et de notre règne le cinquantième.
Louis.
Par le Roy :
Phélypeaux.
Visa Boucherat. Et scellé du grand sceau de cire verte.
Lues et publiées en l'audience du Grand-Conseil du Roy, ouï, ce requérant et consentant le procureur général du Roy ; et enregistrées ès registres dudit Conseil, pour être exécutées, gardées et observées selon leur forme et teneur, suivant l'arrêt rendu audit conseil, ce jourd'hui 9 avril 1693.
Le Normant.
DÉCLARATION du 24 août 1693 qui ordonne l'emploi du revenu des biens des maladreries et léproseries, et qui interprète l'Édit de mars et la déclaration du 15 avril précédent, concernant la désunion des biens de l'Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare. Texte non disponible.
Les marques d'honneur étant la plus noble récompense que Sa Majesté puisse accorder à ceux qui en sont susceptibles pour leur naissance, et qui se rendent recommandables par les services qu'ils lui rendent et à l'État, dans les différentes places où elle juge à propos de les destiner ; elle a cru devoir, à l'exemple des Rois ses prédécesseurs, soutenir les Ordres de Chevalerie qu'ils ont établis, et dont ils se sont déclarés Chefs et Protecteurs, et qu'ils ont toujours regardés comme un des plus sûrs moyens d'exciter cette émulation si avantageuse à l'État. C'est dans cette vue que Sa Majesté a voulu donner un nouveau lustre aux Ordres de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, en nommant à l'état et dignité de Grand-Maître de ces Ordres, qui se trouve vacant par le décès de feu Monsieur le Duc d'Orléans, Monsieur le Duc de Berri, fils de France : Sa Majesté ne pouvant donner une plus haute idée de l'estime et de l'affection qu'elle porte auxdits Ordres, en qualité de Souverain Chef, Fondateur et Protecteur d'iceux, qu'en leur donnant un Chef aussi auguste ; mais elle croit en même temps devoir prendre des mesures nécessaires pour que ces Ordres puissent se soutenir avec splendeur, et expliquer par un nouveau règlement ses intentions sur le nombre des Chevaliers dont elle juge à propos qu'ils soient à l'avenir composés, et sur les qualités des personnes qui y seront admises, afin de rendre cette récompense encore plus flatteuse à ceux qui en seront décorés ; comme aussi pourvoir à l'administration de tout ce qui peut avoir rapport auxdits Ordres, jusqu'à ce que Monsieur le Duc de Berri soit en âge d'y vaquer par lui-même. A cet effet, Sa Majesté a ordonné ce qui suit :
ARTICLE PREMIER.
Nulle personne ne pourra être reçue et admise à l'avenir par le Grand-Maître des Ordres de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, qu'elle n'ait fait les preuves de la religion catholique, apostolique et romaine, dans la forme usitée dans lesdits Ordres, et celle de quatre degrés de noblesse paternelle seulement, le novice compris, fondée sur un principe certain et incontestable de noblesse, sans qu'il puisse, sous quelque titre et prétexte, ni pour aucune cause que ce soit, être accordé aucune dispense des preuves susdites, tant de religion que de noblesse, ni que personne puisse être reçu dans lesdits Ordres avant d'avoir satisfait auxdites preuves.
II.
Pour rendre lesdits Ordres d'autant plus recommandables, Sa Majesté juge à propos de fixer les Chevaliers qui y seront admis à l'avenir, au nombre de Cent, conformément à ce qui avait été prescrit par le brevet du Roi Henri IV, du 30 novembre 1608, y compris les Ecclésiastiques, qui ne pourront y occuper plus de huit places, et qui seront obligés aux mêmes preuves que les Chevaliers laïcs ; l'intention de Sa Majesté étant que le nombre de cent Chevaliers ne puisse être augmenté par le Grand-Maître, auquel elle recommande très-expressément d'y recevoir, par préférence à toutes autres considérations, les personnes qui seront, ou qui auront été employées utilement au service de Sa Majesté dans l'intérieur du Royaume, près de sa personne, dans les cours étrangères, ou dans les places et emplois de confiance, et qui auront les qualités requises par l'article premier du présent règlement ; dérogeant pareillement à tous édits, statuts, règlements, ou autres titres et usages desdits Ordres, en ce qui se trouverait de contraire au présent article. Les familles des Chevaliers qui viendront à décéder, seront obligées d'envoyer au Secrétaire desdits Ordres, des extraits ou certificats de la mort du Chevalier décédé, pour en être fait mention sur les registres desdits Ordres.
III.
Aucunes personnes ne pourront pareillement être reçues dans lesdits Ordres, qu'à l'âge de trente ans accomplis ; et si, par des considérations particulières et relatives à l'avantage de la religion, et au bien du service de Sa Majesté, le Grand Maître jugeait à propos de conférer plutôt ces Ordres à quelques personnes, l'intention de Sa Majesté est qu'il ne le puisse faire au-dessous de l'âge de vingt-cinq ans accomplis, sans qu'il puisse pareillement être accordé de dispenses sur cet article, et ce, nonobstant tous statuts, règlements et usages desdits Ordres à ce contraires.
IV.
Sa Majesté n'entend, par l'article précédent, préjudicier à tous ceux qui jusqu'à ce jour auraient été reçus dans lesdits Ordres, lesquels continueront, leur vie durant, de jouir des honneurs et prérogatives qui y sont attachés, ainsi que des Commanderies, Pensions et Bénéfices dont ils sont en possession.
V.
Sa Majesté veut qu'à l'avenir il ne soit plus reçu dans lesdits Ordres des Chevaliers de grâce, des Commandeurs fondateurs, ni Servans ; son intention étant que lesdits Ordres ne soient composés que des personnes en état de satisfaire à l'article premier de ces présentes ; révoquant en outre toutes concessions qui peuvent avoir été ci-devant données par les Grands-Maîtres desdits Ordres, d'en porter la Croix, si les personnes qui ont obtenu cette permission n'ont pas été reçues Chevaliers, et en conséquence leur fait défense de porter à l'avenir la Croix et le ruban desdits Ordres ; enjoignons aux Grands Officiers d'iceux, d'y tenir exactement la main.
VI.
Veut et ordonne Sa Majesté que les fondations faites par quelques personnes, afin d'être reçues Chevaliers dans lesdits Ordres, pour lesdites fondations appartenir auxdits Ordres après le décès du Fondateur, aient leur ancienne exécution ; à l'égard des fondations faites pareillement à l'effet de pouvoir être admis et reçu Chevaliers dans lesdits Ordres, lesquelles doivent passer au fils aîné, et au défaut du fils aîné, au puîné, et ainsi successivement à tous les enfants mâles du Fondateur, l'intention de Sa Majesté est que le Fondateur, reçu Chevalier, jouisse, sa vie durant, de la Commanderie par lui fondée, qu'il continue de porter la Croix desdits Ordres, et de jouir des honneurs, prérogatives, privilèges et distinctions qui y sont attribués ; mais, après son décès, le fonds de la Commanderie retournera à sa famille dans l'état où il se trouvera alors, comme un bien patrimonial, sans que les enfants et descendants du Fondateur puissent prétendre, en vertu de la fondation faite par leur père ou aïeul, être reçus Chevaliers desdits Ordres, à moins qu'ils n'aient les qualités requises par l'article 1er du présent règlement, et l'âge prescrit par l'article 3 d'icelui ; l'intention de Sa Majesté étant, en réformant lesdits Ordres, de reconnaître et de récompenser le mérite et les services, sans avoir égard à toutes autres considérations particulières : Veut que la même disposition ait lieu à l'égard des fondations pareillement faites par quelques autres personnes, à l'effet d'être reçues Chevaliers, à condition que lesdites fondations passeront à perpétuité à leurs enfants et descendants mâles en ligne directe ; ordonne que les Fondateurs jouiront leur vie durant, en qualité de Chevaliers Fondateurs, de leur Commanderie, mais après leur décès le fonds desdites Commanderies retournera à la famille du Fondateur dans l'état où il se trouvera, comme un bien patrimonial, sans que les enfants ou descendants du Fondateur puissent prétendre, sous prétexte de ladite fondation, à être reçus Chevaliers desdits Ordres, à moins qu'ils n'aient les qualités et âge susdits.
VII.
Désirant renouveler les anciens usages desdits Ordres, concernant les fonctions des Grands Officiers, l'intention de Sa Majesté est qu'à mesure que ceux qui sont actuellement revêtus desdites places viendront à décéder, ils soient remplacés dans leurs fonctions par ceux des Chevaliers que le Grand-Maître jugera à propos de nommer à cet effet, attendu qu'il n'y a dans lesdits Ordres aucune charge vénale : le héraut et les deux huissiers desdits Ordres continueront de faire les fonctions dépendantes de leur place, leur vie durant ; mais, après leur décès, ceux qui leur succéderont jouiront des privilèges attribués auxdits Ordres, sans être tenus de faire d'autre preuve que celle de Religion ; et lesdits héraut et huissiers, présents et à venir, ne pourront porter que la médaille de l'Ordre, attachée à la boutonnière avec le petit ruban couleur de feu de celui desdits Ordres.
VIII.
Voulant statuer sur le droit de passage et autres frais qui seront payés par chacun des Chevaliers qui seront à l'avenir admis dans lesdits Ordres, Sa Majesté a, par le présent règlement, fixé le droit de passage à la somme de mille livres, pour être distribuée entre eux, suivant l'usage jusqu'à présent observé, indépendamment des honoraires du généalogiste, qui n'aura aucune part dans le droit de passage, et qui sera payé par les Chevaliers reçus.
IX.
Veut Sa Majesté que les preuves de Noblesse de ceux qui seront nommés auxdits Ordres, soient faites par le sieur de Clairambault, généalogiste de ses Ordres, qu'elle commet par le présent règlement, sans qu'il soit tenu de faire aucun nouveau serment ; lequel, après les avoir signées et certifiées, en fera le rapport au Grand-Maître, lorsqu'il administrera lui-même lesdits Ordres, et en présence de ceux des Officiers et Chevaliers qu'il lui plaira de nommer ; et jusqu'à ce que le Grand-Maître gouverne par lui-même lesdits Ordres, les preuves de Noblesse seront admises de la manière dont Sa Majesté l'expliquera par le présent règlement ; et d'autant que le généalogiste des Ordres de Sa Majesté se trouve faire les mêmes fonctions dans ceux de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem ; il portera la Croix desdits Ordres, sans être tenu à aucune des formalités, prescrites par l'article premier du présent règlement.
X.
Les Chevaliers porteront au col la Croix desdits Ordres, attachée à un ruban de couleur amarante, et dans les occasions de cérémonies, ils porteront la Croix ainsi, et de la manière dont il a été usé jusqu'à présent.
XI.
Et attendu que monsieur le duc de Berri n'est pas en état d'administrer par lui-même lesdits Ordres, Sa Majesté a cru devoir en confier la régie, administration et gouvernement à une personne dont le zèle pour la personne de Sa Majesté, celle de monsieur le duc de Berri, et pour lesdits Ordres, lui soient également connus ; et à cet effet, Sa Majesté a fait choix du sieur Louis Phélypeaux, comte de Saint-Florentin, conseiller en tous ses conseils, ministre d'État, secrétaire d'État et de ses commandements, Commandeur et Chancelier de ses Ordres, chancelier de la Reine, pour avoir l'Administration générale de tout ce qui peut concerner lesdits Ordres, tant pour les biens qui lui appartiennent, que pour tout ce qui a rapport au cérémonial ; comme aussi, pour présider aux Chapitres généraux ou Assemblées particulières, et Conseil desdits Ordres ; recevoir de par Sa Majesté, monsieur le duc de Berri, et en sa présence, le serment des Chevaliers, que Sa Majesté se réserve de nommer jusqu'à la majorité de monsieur le duc de Berri, et généralement, pour faire et ordonner au nom du Grand-Maitre, tout ce qu'il pourrait faire et ordonner par lui-même. Et attendu que cette fonction honorable exige une distinction extérieure desdits Ordres, l'intention de Sa Majesté est que ledit sieur comte de Saint-Florentin puisse en porter la Croix, sans être tenu à aucune réception ; Sa Majesté a commis et commet par ledit présent règlement ledit sieur comte de Saint-Florentin, pour entendre les preuves des Chevaliers qu'elle aura nommés, et pour lui en rendre compte avant la réception, comme aussi pour prendre possession, pour et au nom de monsieur le duc de Berri, dudit état et dignité de Grand-Maitre desdits Ordres, et de tout ce qui en dépend.
XII.
Voulant régler la forme dans laquelle les Chevaliers desdits Ordres, qui auront été par Sa Majesté nommés, seront reçus, son intention est qu'ils le soient en présence et dans l'appartement du Grand-Maître : et ledit comte de Saint-Florentin, que Sa Majesté a commis à cet effet, recevra leur serment pour et au nom du Grand-Maître, en présence des Grands Officiers et Chevaliers qui y auront été appelés ; et ce, jusqu'à ce que le Grand-Maitre soit en âge de recevoir par lui-même le serment des Chevaliers ; et de se conformer à l'ancien cérémonial, ou à celui qu'il jugera à propos d'introduire : Sa Majesté veut que les réceptions soient faites à l'issue de la Messe qui sera célébrée dans la chambre ou chapelle dudit Grand-Maître.
XIII.
Sa Majesté confirmant lesdits Ordres de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, dans tous et chacun des droits, privilèges, franchises et exemptions qui y ont été attribués par les Papes, par les Rois prédécesseurs de Sa Majesté, et par elle-même ; et ce, conformément aux bulles des Papes, édits, déclarations, arrêts et règlements rendus par les Rois ses prédécesseurs, ou par Sa Majesté, en faveur des Ordres.
XIV.
Les Chevaliers de minorité qui ont été jusqu'à présent admis et non reçus, qui ne sont point en état de faire les preuves prescrites par l'article 1er de ces présentes, ne pourront être reçus à la profession dans lesdits Ordres, ni en porter la Croix. A l'égard de ceux qui ont été admis en minorité pour être reçus dans la suite, l'intention de Sa Majesté est qu'ils ne le puissent être que lorsqu'ils auront atteint au moins l'âge de vingt-cinq ans accomplis, et en satisfaisant par eux au présent règlement, sans qu'à l'avenir il puisse être reçu dans lesdits Ordres, aucun Chevalier en minorité.
XV.
Veut néanmoins Sa Majesté que ceux des gentilshommes qui auront été élevés dans l'École Royale Militaire, et qu'elle jugera à propos d'admettre dans lesdits Ordres, puissent y être reçus en satisfaisant à l'article 1er du présent règlement, quoiqu'ils n'eussent pas l'âge prescrit par l'article 3 d'icelui, et que le nombre de cent Chevaliers, auquel elle veut que lesdits Ordres soient réduits à l'avenir, se trouvât rempli ; son intention étant qu'il puisse être excédé en faveur desdits gentilshommes seulement qu'elle jugera à propos d'y admettre. Veut pareillement que ceux d'entre eux que Sa Majesté ou le Grand-Maître jugeront à propos de recevoir dans lesdits Ordres, soient exempts du droit de passage et tous autres droits, lorsqu'ils seront reçus dans lesdits Ordres : son intention est au surplus, que jusqu'à ce qu'ils aient l'âge de trente ans accomplis, ils ne puissent porter que la petite Croix desdits Ordres à quatre branches, attachée à la boutonnière avec un ruban de la couleur de celui desdits Ordres ; et même lorsqu'ils auront atteint ledit âge de trente ans, ils ne pourront porter la grande Croix et cordon desdits Ordres ; sans en avoir obtenu la permission du Grand Maître.
Mande et ordonne Sa Majesté au Grand Maître desdits Ordres, audit sieur de Saint-Florentin, aux Grands Officiers et Chevaliers, et à tous autres composant ou dépendants desdits Ordres, de garder, observer et se conformer au présent règlement, qui sera enregistré ès registres de l'Ordre dans un Chapitre général, pour être exactement exécuté selon sa forme et teneur.
Fait et arrêté à Versailles, le Roi y étant, le quinze juin 1757.
Louis.
Par le Roi :
Phélypeaux.
Lu et enregistré au registre capitulaire desdits Ordres, le lundi vingt juin mil sept cent cinquante-sept, au Chapitre tenu au vieux Louvre par ordre du Roi ledit jour, par nous Claude Dorat de Chameulles, Chevalier, Commandeur, Greffier, Secrétaire général desdits Ordres.
Dorat de Chameulles.
Louis-Stanislas-Xavier de France, frère du Roi, Grand-Maître Général, tant au spirituel qu'au temporel, des Ordres royaux, militaires et hospitaliers de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, Bethléem et Nazareth, tant deçà que delà les mers ; à nos Frères les Grands Officiers, Commandeurs et Chevaliers de nosdits Ordres, salut.
L'Ordre de Saint-Lazare, l'une des institutions les plus anciennes et les plus distinguées qu'aient enfantés le courage, le zèle et la piété de la noblesse française, a toujours été digne de sa respectable origine, et honoré de la faveur de nos Rois. Henri IV s'est occupé d'ajouter à son lustre, en y réunissant l'Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel. Le feu Roi notre aïeul l'a honoré de sa protection encore plus particulière, en confiant la dignité de Grand-Maître de cet Ordre au second de ses petits-fils, et ensuite à nous, lorsque notre très-honoré Seigneur et frère s'est trouvé destiné au trône. Il a autorisé plusieurs règlements également utiles et honorables pour ledit Ordre, en reculant les preuves nécessaires pour y être admis, en limitant le nombre des Chevaliers qui le composent, en le rétablissant dans une partie de ses biens, et en le rappelant, autant qu'il était possible, à la gloire et à la pureté de son origine.
Nous efforçant de marcher sur des traces aussi respectables, et considérant que les pieuses occupations aux quelles étaient consacrés les dignes Chevaliers qui ont institué cet Ordre, tenaient à des circonstances qui n'existent plus ; mais que l'honneur et la vertu, qui en étaient l'âme, subsistent et distinguent particulièrement la noblesse française, nous avons pensé que tout ce qui pourrait contribuer à mettre dans une plus grande activité ces qualités distinctives, rentrait dans l'esprit des fondateurs et dans l'objet de l'institution. Nous avons cru en conséquence que la profession militaire, exercée avec tant de zèle par la noblesse française, consacrée à la défense et à la gloire de la patrie, méritait de jouir exclusivement des avantages de cet Ordre, et qu'il serait utile de les combiner de manière qu'ils pussent être, dans les différents grades, une récompense proportionnée aux services, sans altérer les principes d'égalité qui doivent toujours être la base de toutes les institutions de Chevalerie. Ces motifs nous ont déterminé, après un examen profond et réfléchi, à prescrire de nouvelles règles qui tendissent vers ce but ; et la noblesse française, objet de ce travail, doit le regarder comme une nouvelle preuve de notre affection constante et particulière. A ces causes, en vertu du pouvoir que nous donne notre dignité de Grand-Maître des Ordres royaux, militaires et hospitaliers de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, sous le bon plaisir et de l'agrément du Roi, notre très-honoré Seigneur et frère, nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit :
ARTICLE PREMIER.
Les Ordres unis de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem resteront composés de Cent Chevaliers profès, compris les huit Commandeurs Ecclésiastiques, lesquels cent Chevaliers seront à jamais choisis parmi les gentilshommes de la plus ancienne noblesse du royaume.
II.
Nul ne pourra être admis à la profession dans lesdits Ordres, s'il n'est employé au service du Roi au moins en qualité de capitaine en second de ses troupes, ou d'enseigne de vaisseau.
Les gentilshommes qui, au lieu de servir le Roi dans ses troupes, l'auront servi en qualité de ministres de Sa Majesté dans les cours étrangères, auront le même privilège que s'ils étaient eux-mêmes au service dans le grade de colonel.
Les Commandeurs Ecclésiastiques seront assujettis à faire preuve de leur ancienne noblesse, et que leur père a servi vingt ans, ou est mort au service.
III.
On ne pourra faire profession dans lesdits Ordres, qu'après avoir rempli les conditions portées dans les articles 3 et 4 du règlement du 20 mars 1773 ; c'est-à-dire, qu'après avoir atteint l'âge de trente ans accomplis, justifié de sa religion catholique, apostolique et romaine, de sa naissance légitime, et de huit degrés de noblesse paternelle, non compris le récipiendaire, sans anoblissement connu, conformément à l'article 4 dudit règlement, dont les dispositions à cet égard seront toujours exécutées à la rigueur, et contre lesquelles, dans quelque cas que ce soit, il ne pourra jamais être accordé de dispenses.
IV.
En conséquence des dispositions ci-dessus, nosdits Ordres ne seront presque composés à l'avenir que de gentilshommes, servant le Roi dans l'état militaire, depuis le grade de capitaine en second au service de terre, ou d'enseigne de vaisseau, jusqu'aux grades les plus élevés ; et nous avons pensé, qu'égaux comme Chevaliers, et ne l'étant pas comme militaires, il importait à la subordination, qui est la base de leur métier, que la marque de profession qui indiquera dans tous la même noblesse, la même vertu et les mêmes obligations, indiquât aussi, par une différence sensible, la différence des classes militaires dans lesquelles se trouveront lesdits Chevaliers ; de manière que ces marques fussent pour eux un nouveau motif d'émulation. En conséquence, nous avons divisé et divisons les Chevaliers desdits Ordres en deux classes, dont la première sera composée de tous les Chevaliers revêtus du grade de colonel ou capitaine de vaisseau, et des grades supérieurs ; et la seconde de tous les autres, depuis le grade de capitaine en second ou d'enseigne de vaisseau, jusqu'à celui de colonel, ou capitaine de vaisseau exclusivement.
Les Commandeurs Ecclésiastiques, ceux qui seront ou auront été ministres du Roi dans les cours étrangères, et les Grands Officiers de l'Ordre, seront toujours compris dans la première classe.
V.
La marque de nosdits Ordres sera à l'avenir une Croix d'or émaillée, telle qu'elle est aujourd'hui, ornée de la devise que nous adoptons, Atavis et Armis, inscrite en lettres d'or autour de l'effigie de Saint-Lazare, et suspendue au cou par un ruban vert, ancienne couleur de cet Ordre, que nous voulons ramener dans tous les points à sa première institution. La marque de profession sera, pour les Chevaliers de la première classe, une Croix brodée sur le côté gauche de l'habit, en paillons d'or vert, entourée de paillettes d'or, surmontée au milieu d'une Croix d'argent, avec le chiffre de Saint-Lazare en or sur la branche d'en haut, et celui de la Sainte Vierge sur la branche d'en bas, et au milieu, cette légende en lettres d'or, Atavis et Armis ; et pour les Chevaliers de la deuxième classe, la Croix verte, telle qu'ils la portent à présent, au milieu de laquelle sera placée la même Croix d'argent, ornée des mêmes chiffres et de la même devise : le tout conformément, pour la forme et grandeur, au modèle que nous avons approuvé, et qui sera déposé aux archives de nosdits Ordres.
VI.
Comme ce ne sera jamais notre volonté, mais la grâce du Roi, qui en élevant un Chevalier de la deuxième classe au grade de colonel, ou de capitaine de vaisseau, le fera passer à la première classe, notre intention est qu'aussitôt que nous aurons déterminé la liste de ceux qui, en raison de leur état actuel, composeront la deuxième classe de nosdits Ordres, ils soient fidèles à en porter les marques ; et quand un desdits Chevaliers aura obtenu le grade de colonel, ou l'une des dignités qui font partie de la première classe, il en donnera avis au Chancelier de nosdits Ordres, qui, après nous en avoir rendu compte et avoir pris nos ordres, enverra sans délai audit Chevalier les marques de cette classe, et notre permission de les porter.
VII.
Comme la division que nous faisons des Chevaliers de nosdits Ordres en deux classes, n'est relative qu'à leurs grades militaires, et que nous n'entendons pas qu'elle altère, en aucune façon, l'égalité que met entr'eux la dignité et leur état de Chevalier ; à toutes les cérémonies de nosdits Ordres, les Chevaliers des deux classes marcheront indistinctement à leur rang de Chevalier, et suivant la date de leur réception.
VIII.
Aussitôt que les revenus de nosdits Ordres le permettront, il sera fait une nouvelle distribution de Commanderies, de manière à faire participer le plus grand nombre des Chevaliers qu'il sera possible, aux biens de l'Ordre, et cela, dans la proportion de leurs différents grades.
IX.
Les Chevaliers de nosdits Ordres, qui viendraient à quitter le service, cesseront de ce moment de pouvoir prétendre à une Commanderie, s'ils n'en ont pas, ou s'ils en ont, à en obtenir une meilleure ; et, dans aucun cas, ils ne pourront recevoir aucune nouvelle grâce dans l'Ordre.
X.
Notre attachement pour les principes de l'état intéressant auquel nosdits Ordres seront consacrés à l'avenir, nous force de prévenir un cas qui sans doute n'arrivera jamais. Mais si, contre toute apparence, il était possible qu'un Chevalier, après sa profession dans nosdits Ordres, méritât d'être cassé, et fût à ce titre hors de service, il sera dépouillé des Commanderies dont il aurait été pourvu, ne sera convoqué à aucuns chapitre ni cérémonies, comme ne faisant plus partie de nos Ordres.
XI.
Seront au surplus les anciens statuts et règlements gardés et observés dans tous les points auxquels il n'a point été dérogé par le présent règlement ; nous réservant, en vertu de l'autorité attachée à notre qualité de Grand-Maître, de faire, avec l'agrément du Roi, notre très-honoré Seigneur et frère, tous les changements que nous trouverons convenables à l'avantage de nosdits Ordres, et au bien du service. Si donnons en mandement à nos Frères les Grands Officiers, Commandeurs et Chevaliers de nosdits Ordres, de garder et observer le présent règlement, et de tenir la main, chacun en droit soi, à son exécution.
En foi de quoi nous avons signé ces présentes de notre main, icelles fait contre-signer par notre Frère Chevalier-Commandeur, Secrétaire général desdits Ordres.
Donné à Versailles, le trente-et-unième jour du mois de décembre 1778.
Louis-Stanislas-Xavier.
Dorat de Chameulles.
De par le Roi.
Sa Majesté s'étant fait représenter les règlements qui ont accordé aux jeunes gentilshommes, élèves de l'École royale militaire, l'avantage d'être reçus novices dans les Ordres militaires et hospitaliers de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, elle a jugé qu'une grâce indistinctement accordée à tous les élèves ne pouvait que perdre de sa valeur, et qu'une admission aussi honorable devait être la récompense offerte à l'émulation des jeunes gentilshommes qui, enfants de l'État par leur éducation, auraient donné les espérances les plus fondées de devenir des sujets distingués, et qui seraient jugés les plus dignes d'obtenir une décoration qui sera la preuve de leur capacité et de leurs premiers succès : en conséquence, et de l'avis de Monsieur, Grand-Maître des Ordres de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, Sa Majesté a réglé ce qui suit :
ARTICLE PREMIER.
L'Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel faisant partie de ceux qui sont réunis sous la même Grande Maîtrise, sera destiné à l'avenir aux seuls élèves de l'École royale militaire, qui seront jugés dignes d'être admis dans cet Ordre.
II.
Il sera présenté chaque année au Grand Maître par le secrétaire d'État ayant le département de la guerre, un État de six élèves de l'École royale militaire, qui, par leurs mœurs, leurs progrès et leurs heureuses dispositions, seront jugés, par l'inspecteur général, les plus dignes d'être admis dans l'Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel ; et trois d'entr'eux, au choix du Grand-Maître, seront reçus Chevaliers dudit Ordre.
III.
La marque distinctive de l'Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel sera portée par les élèves de l'École royale militaire qui en seront honorés, ainsi que le Grand-Maître le prescrira par un règlement particulier émané de son autorité.
IV.
Tous les élèves de l'École royale militaire qui auront été reçus Chevaliers de l'Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel, jouiront, sur les fonds de l'Ordre, d'une pension annuelle de cent livres, indépendamment de celle de deux cents livres qui leur sera accordée sur les revenus de l'École royale militaire. Ils conserveront leur pension de cent livres tant qu'ils seront au service ; et même hors du service, mais dans le cas seulement où des blessures reçues à la guerre, et duement constatées, les auraient forcés à se retirer.
V.
Lorsqu'un élève de l'École royale militaire, Chevalier de l'Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel, se sera distingué à la guerre par quelque action d'éclat, qui, en réunissant les succès dus à la valeur et à l'intelligence, aura procuré quelque avantage important ; le Grand-Maître, sur l'attestation du général de l'armée, et du secrétaire d'État de la guerre, en se réservant toutefois le droit de juger du mérite de l'action, le recevra sur-le-champ et sans autre preuve, Chevalier de l'Ordre de Saint-Lazare ; et la réunion des Croix des deux Ordres, qui ne pourra avoir lieu que dans ce seul cas, offrira la preuve honorable du service qu'il aura rendu à l'État.
Fait à Versailles, le 21 janvier 1779.
Louis.
Le Prince de Montbarrey.
Louis-Stanislas-Xavier de France, frère du Roi, Grand-Maître Général, tant au spirituel qu'au temporel, des Ordres royaux militaires et hospitaliers de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, Bethléem et Nazareth, tant deçà que delà les mers ; à nos Frères les Grands Officiers, Commandeurs et Chevaliers de nosdits Ordres ; salut.
Le désir que nous avons de contribuer, autant qu'il est en notre pouvoir, au bien de l'État, et de voir les Ordres dont nous sommes Grand-Maître devenir un objet d'émulation pour tous ceux qui servent le Roi dans ses troupes, nous a porté à considérer, avec une attention particulière, l'école intéressante dans laquelle le Roi fait élever les enfants de ceux qui ont consacré leurs jours ou perdu la vie à son service. Les règlements précédents, qui leur accordaient, pour prix de leur bonne conduite, l'avantage d'être reçus novices dans nosdits Ordres, ne leur donnait aucun état précis. Leur décoration presque semblable à celle des Officiers de nos Ordres, qui ne peuvent leur être assimilés, les confondoit avec eux, et la multiplicité de cette distinction, qui en diminuait l'éclat, rendait impossible l'exercice d'une libéralité qui ne pourrait être placée d'une manière plus utile et plus honorable que sur des gentilshommes, que nous devons regarder comme les enfants de l'État. Nous avons exposé ces différents motifs au Roi, notre très-honoré Seigneur et frère. La protection dont il honore la noblesse de son royaume, l'a engagé à donner le sceau de son approbation, aux moyens que nous lui avons proposés pour remédier, d'une part, aux inconvénients antérieurs, et pour procurer, de l'autre, les nouveaux avantages que nous avions en vue. L'acte de bienfaisance qui les accompagnera, n'est point l'effet de notre seule générosité ; l'Ordre entier nous a demandé d'y contribuer à frais communs, et s'empresse d'acquitter ainsi ce que lui inspirent l'honneur, la religion et l'attachement à l'État. Ces glorieux sentiments ont présidé à ses délibérations, et pour en établir l'effet sur des fondements solides, nous, en vertu du pouvoir que nous donne notre dignité de Grand-Maître des Ordres royaux militaires et hospitaliers de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, sous le bon plaisir et de l'agrément du Roi, notre très-honoré Seigneur et frère, nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit :
ARTICLE PREMIER.
L'Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel, faisant partie de ceux dont nous sommes Grand-Maître, sera désormais consacré uniquement à ceux des élèves de l'École royale militaire, que nous jugerons à propos d'y admettre ; et, après leur nomination, quand la vérification de leur preuve aura été faite, ainsi que l'information de leurs vie et mœurs, ils seront reçus Chevaliers dudit Ordre, dans la forme que nous prescrirons.
II.
La marque de cet Ordre consistera dans la petite Croix, pareille pour la forme et grandeur, à celle qui a été d'usage jusqu'à présent : sur un côté, sera placée l'effigie de la Sainte Vierge, et un trophée orné de trois fleurs de lys ; de l'autre côté, cette Croix sera suspendue à la boutonnière de l'habit par un ruban cramoisi.
III.
Chacun des Chevaliers que nous admettrons dans ledit Ordre sera tenu de prouver quatre degrés de noblesse paternelle ; et nous admettrons pour cela les preuves fournies pour leur admission à l'École militaire, qui pourtant seront représentées aux Commissaires que nous nommerons à cet effet.
IV.
Nous choisirons tous les ans, parmi les sujets les plus distingués qui seront dans le cas de sortir de l'École militaire pour entrer au service, et dont la liste nous sera présentée dans la forme qu'il plaira au Roi de déterminer, trois d'entr'eux que nous nommerons Chevaliers de l'Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel.
V.
Chacun de ces trois Chevaliers recevra, à dater du premier janvier de l'année qui suivra sa réception, une pension annuelle de cent livres, qui lui sera payée sur le trésor de l'Ordre, et qu'il conservera tout le temps qu'il restera au service, à moins que des blessures reçues à la guerre et dûment constatées ne l'aient forcé de s'en retirer.
VI.
Si un de ces nouveaux Chevaliers de l'Ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel a le bonheur de faire à la guerre une action de courage et d'intelligence qui ait un grand éclat et de grands avantages, il pourra se présenter à nous avec l'attestation du général de l'armée et du ministre de la guerre ; et après nous être fait rendre compte de cette action et de son importance, si la jugeons assez considérable, nous le nommerons sur-le-champ et sans autre preuve, Chevalier de Saint-Lazare ; et la réunion des deux Croix, qui n'aura lieu que dans ce seul cas, sera une attestation éternelle de sa gloire : dérogeant pour ce cas seulement à l'article 3 du règlement du 31 décembre 1778.
VII.
Au surplus, nous n'entendons rien changer à l'état des élèves de l'École militaire qui ont jusqu'à présent été reçus novices dans nosdits Ordres : ils continueront d'en porter les marques comme par le passé, mais ils ne peuvent, en raison de leur grand nombre, participer aux avantages que nous accordons aux nouveaux, et que notre sagesse nous a forcé de combiner avec nos moyens.
Si donnons en mandement à nos Frères les Grands Officiers, Commandeurs et Chevaliers de nosdits Ordres, de garder et observer le présent règlement, et de tenir la main, chacun en droit soi, à son exécution. En foi de quoi nous avons signé ces présentes de notre main ; icelles fait contre-signer par notre Frère Chevalier Commandeur, Secrétaire général desdits Ordres.
Donné à Versailles, le vingt et unième jour de janvier 1779.
Louis-Stanislas-Xavier.
Dorat de Chameulles.
Art. 1er. — Tout ordre de chevalerie ou autre, toute corporation, toute décoration, tout signe extérieur qui suppose des distinctions de naissance, sont supprimés en France ; il ne pourra en être établi de semblables à l'avenir.
Art. 2. — L'assemblée nationale se réserve de statuer s'il y aura une décoration nationale unique, qui pourra être accordée aux vertus, aux talents et aux services rendus à l'État ; et néanmoins, en attendant qu'elle ait statué sur cet objet, les militaires pourront continuer de porter et de recevoir la décoration militaire actuellement existante.
Art. 3. — Aucun Français ne pourra prendre aucune des qualités supprimées soit par le décret du 19 juin 1790, soit par le présent décret, pas même avec les expressions de ci-devant ou autres équivalentes ; il est défendu à tout officier public de donner lesdites qualités à aucun Français dans les actes. Il est pareillement défendu à tout officier de faire aucun acte tendant à la preuve des qualités supprimées par le décret du 19 juin 1790 et par le présent décret. Les comités de constitution et de jurisprudence criminelle présenteront incessamment un projet de décret sur les peines à porter contre ceux qui contreviendraient à la présente disposition.
Art. 4. — Tout Français qui demanderait ou obtiendrait l'admission, ou qui conserverait l'affiliation à un ordre de chevalerie ou autre, ou corporation établie en pays étranger, fondée sur des distinctions de naissance, perdra la qualité et les droits de citoyen français. ( Par un décret du 27 septembre 1791, il a été ajouté : Mais il pourra être employé au service de la France, comme tout étranger. )
Art. 1er. — A dater du jour de la publication du présent décret, les domaines qui faisaient partie de la dotation des ordres religieux et militaires de Saint-Lazare et de Notre-Dame du Mont-Carmel, et autres y réunis, supprimés par le décret du 30 juillet 1791, seront aliénés suivant les formes décrétées pour les autres biens nationaux, et leurs revenus administrés de même.
Art. 2. — A compter de la même époque, il ne sera fait aucun paiement sur lesdits revenus aux commandeurs, chevaliers ou pensionnaires desdits ordres.
Art. 3. — Toutes les nominations de commanderies ou pensions sur les ordres ci-dessus énoncés, postérieures à la promulgation du décret du 30 juillet 1791, seront regardées comme non avenues, et leur produit acquis au profit de la nation : en conséquence, tous trésoriers, receveurs, et autres demeurent personnellement responsables des paiements qu'ils pourraient avoir faits.
Art. 4. — Les ci-devant chancelier et trésorier des ordres de Saint-Lazare, Notre-Dame du Mont-Carmel, et autres y réunis, seront tenus de rendre leurs comptes à la municipalité de Paris, quinze jours après la promulgation du présent décret, et de faire dans le même délai la déclaration des biens desdits ordres, tant à la municipalité de Paris qu'aux directoires des districts de la situation desdits biens, conformément aux dispositions des lois sur la déclaration des biens ci-devant ecclésiastiques.
Art. 5. — Les pourvus de commanderies et de pensions militaires dans les susdits ordres supprimés, présenteront leurs mémoires au commissaire du roi directeur général de la liquidation, à l'effet d'être établi des pensions en leur faveur, s'il y a lieu, aux termes de la loi du 23 août 1790. Lesdits commandeurs et pensionnaires seront considérés, à cet effet, comme les personnes qui étaient pensionnées à l'époque du 1er janvier 1790, et ils seront traités en tout de la même manière qui a été réglée par l'article 6 du décret du 20 février 1791 sur les gouvernements militaires supprimés.
Art. 6. — Le traitement des pourvus de commanderies et de pensions ecclésiastiques, celui des chapelains, aumôniers et sacristains desdits ordres, sera fait suivant les dispositions du décret du 24 juillet 1790, sur le traitement du clergé, et leurs commanderies et autres revenus ecclésiastiques seront regardés comme pensions sur bénéfices. En conséquence, lesdits commandeurs, pensionnaires ecclésiastiques, chapelains, aumôniers et sacristains, se présenteront à la municipalité de Paris, pour, sur son avis et celui du directoire du département, faire fixer ce traitement à raison des commanderies dont ils étaient titulaires.
Art. 7. — Ceux des susdits commandeurs ecclésiastiques, pensionnaires, chapelains, aumôniers et sacristains, qui jouissaient en même temps d'autres bénéfices ou d'autres pensions sur bénéfices, s'adresseront aux directoires qui ont réglé leur premier traitement ; et, en tout ce qui regarde lesdits traitements et ceux mentionnés en l'article précédent, la municipalité de Paris et les directoires de district se conformeront aux dispositions du décret du 11 août 1790, sur le traitement du clergé.
Art. 8. — Le nouveau traitement des commandeurs ou pensionnaires ecclésiastiques de Saint-Lazare et de Notre-Dame du Mont-Carmel, à raison de leurs commanderies et pensions sur lesdits ordres, commencera à courir du 1er janvier 1792 ; mais ils tiendront compte de ce qu'ils pourront avoir touché depuis l'époque de la promulgation du décret du 30 juillet 1791.
Art. 9. — La municipalité de Paris, sous la surveillance du département, pourvoira à la sûreté et à la conservation des archives des ordres de Saint-Lazare et de ceux supprimés par le décret du 30 juillet 1791 ; elle fera procéder en outre à l'inventaire des titres de propriétés nationales qui peuvent se trouver dans lesdites archives.
Art. 10. — Il sera créé, suivant les formes prescrites par le décret du 3 août 1790 ; en faveur des sieurs Landrieux, concierge, Guerber, suisse, Philippe Tartara, frotteur de l'hôtel de l'ordre de Saint-Lazare, des pensions égales à la moitié des gages dont ils jouissaient pour leurs services dans ledit ordre, à la charge par eux d'en justifier.
Art. 11. — Les sommes que le sieur Duprat, régisseur et agent desdits ordres, leur a payées en entrant à l'agence, à la décharge de son prédécesseur, lui seront remboursées par le trésor public, conformément aux règles établies pour les créances des corps supprimés ; à cet effet, il se pourvoira par-devant le commissaire du roi directeur général de la liquidation.
Art. 12. — Les pensionnaires et titulaires de gratifications annuelles sur les ordres de Saint-Lazare et du Mont-Carmel, établies par titres authentiques, se pourvoiront également par-devant le même commissaire, pour faire recréer en leur faveur de nouvelles pensions, en conformité du décret du 3 août 1790.
Art. 1er. — L'intendant et le garde des archives, l'agent des affaires, le régisseur des biens, les huissiers et le héraut d'armes de l'ordre de Saint-Lazare et du Mont-Carmel, recevront pour retraite, à titre de pension, la moitié des émoluments dont ils justifieront par titres authentiques avoir joui dans ledit ordre.
Art. 2. — Le maximum de ces pensions ne pourra excéder mille livres.
Art. 3. — Les susdites pensions seront censées avoir commencé à courir du 1er janvier dernier ; en conséquence, les officiers ci-dessus tiendront compte de ce qu'ils peuvent avoir reçu de leurs émoluments depuis cette époque, lesquelles sommes seront imputées sur le premier paiement de leur pension.
Art. 4. — Ces nouveaux pensionnaires, et ceux établis par le décret du 17 mars, seront soumis en tout aux dispositions du décret du 3-22 août 1790, sur les pensions ; à celles du décret du 13-17 décembre 1791 ; et, en conséquence, ne pourront être portés sur deux états dans la liste des pensions.
L'article 4 de l'ordonnance du 16 avril dernier concernant les ordres français et étrangers charge de son exécution les ministres secrétaires d'État de la guerre et de la marine et le grand chancelier de la Légion d'honneur.
Quoique les dispositions que cette ordonnance renferme soient plus particulièrement recommandées à la vigilance de MM. les procureurs généraux et de tous les officiers de justice du roi, il n'est pas moins du devoir de toutes les autorités de concourir avec eux à son exécution pour atteindre le but que Sa Majesté s'est proposé, qui est de faire cesser les abus et le scandale causés par cette multitude de rubans de toutes couleurs, de croix, de décorations de toutes formes et dénominations, abusivement donnés et non moins illégalement portés par des sujets de Sa Majesté.
Il est du devoir des autorités de rappeler ce principe trop méconnu, qu'au roi seul appartient le droit de conférer des ordres français, et d'autoriser à accepter et porter ceux accordés par les souverains étrangers.
La volonté expresse de Sa Majesté est que toutes décorations et tous signes extérieurs qui ne rentrent pas dans l'une de ces deux catégories soient, sans exception, déposés à l'instant, sous les peines portées par l'article 259 du Code pénal.
Les demandes en autorisation d'accepter et de porter les ordres étrangers ne seront accueillies que pour ceux reconnus du gouvernement du roi, et ne peuvent être soumises à l'approbation de Sa Majesté que par le grand chancelier de la Légion d'honneur ( articles 67 et 69 de l'ordonnance du 26 mars 1816 ).
Il n'échappera à personne que l'objet principal que Sa Majesté a en vue, en rendant l'ordonnance du 16 avril, a été de maintenir la considération due aux ordres dont le roi est le souverain et le grand maître, et que Sa Majesté seule confère à ses sujets pour prix de services certains et vérifiés.
Les seuls ordres royaux avoués sont ceux :
1° Du Saint-Esprit,
2° De Saint-Michel,
3° De Saint-Louis,
4° Du Mérite militaire,
5° De la Légion d'honneur,
6° De Saint-Lazare et de Notre-Dame-du-Mont-Carmel réunis.
Tous les sujets du roi décorés de l'un de ces ordres doivent être munis de brevets ou de lettres d'avis constatant leur nomination, et signés, savoir :
Pour celui du Saint-Esprit, par M. le chancelier de l'ordre ;
Pour celui de Saint-Michel, par le ministre de la maison du roi ;
Pour ceux de Saint-Louis et du Mérite militaire, par les ministres de la guerre ou de la marine ;
Pour celui de la Légion d'honneur, par le grand chancelier de l'ordre ;
Enfin, pour les ordres réunis de Saint-Lazare et de Notre-Dame-du-Mont-Carmel, par le ministre de la maison du roi.
Depuis l'année 1788, ce dernier ordre ne se confère plus : on le laisse éteindre.
Tous autres prétendus ordres qui se qualifient de français, tels que ceux de Saint-Georges, de Franche-Comté, de Saint-Hubert des Ardennes, de Lorraine et du Barrois, du Saint-Sépulcre de Jérusalem, et tous autres, sous quelque titre ou dénomination que ce soit, donnés par des commissions, chapitres, corporations, associations, confréries, archiconfréries, prétendus grands maîtres ou leurs délégués, gouverneurs ou administrateurs généraux, etc.. sont déclarés abolis, conséquemment nuls, illégaux, abusifs ; et ceux qui ne les quitteront point à l'instant sont passibles des peines portées par l'article 259 du Code pénal.
Quoique les rubans et décorations des six ordres français soient assez généralement connus, il ne parait pas superflu de donner ici quelques explications sur la forme des décorations, la couleur des rubans, et sur la manière dont ils doivent être portés.
L'ordre du Saint-Esprit a un large ruban de soie moirée, bleu céleste, avec plaque en argent et croix à huit pointes anglées de fleurs de lis représentant une colombe au milieu. Les chevaliers et commandeurs portent le cordon en baudrier sur la veste ou sur l'habit ; les quatre officiers de l'ordre, qui sont le héraut, l'huissier, le garde des archives et le secrétaire de la chancellerie, portent la décoration en sautoir ; et les chevaliers, les commandeurs et les quatre officiers de l'ordre, ne doivent porter ni ruban ni décoration à la boutonnière de l'habit.
Celui de Saint-Michel a un large ruban de soie noire moirée, que les chevaliers doivent porter seulement sur la veste. Au bas du ruban est attachée une croix à huit pointes anglées de fleurs de lis représentant Saint-Michel foulant le dragon. Cet ordre n'a point de plaque ni d'autre degré. Les chevaliers ne doivent porter le ruban ou la croix ni en sautoir ni à la boutonnière de l'habit.
L'ordre de Saint-Louis a trois degrés : les grand'croix, les commandeurs et les chevaliers. Les premiers portent un large ruban moiré, couleur de feu, en forme de baudrier, soit sur la veste, soit sur l'habit. Au bas du ruban est attachée la grande croix de l'ordre, ayant au centre l'effigie de Saint-Louis. Ils portent en outre, au côté gauche de l'habit, une plaque en or au milieu de laquelle est aussi représentée la même image.
Les commandeurs portent le ruban large sans plaque, et les chevaliers le ruban et la décoration à la boutonnière de l'habit.
L'ordre du Mérite militaire est en tout conforme à celui de Saint-Louis, avec cette seule différence que la croix, au lieu de l'effigie de Saint-Louis, représente une épée en pal. Cette décoration est destinée aux militaires qui professent la religion réformée.
L'ordre de la Légion d'honneur a cinq degrés. Il est suffisamment connu, et n'a besoin d'aucune explication. On fait observer, toutefois, que les chevaliers de cet ordre ne peuvent porter de rosette au ruban : elle appartient au grade d'officier.
Il n'est que trop certain que beaucoup d'individus se permettent de porter indûment les décorations de Saint-Louis et de la Légion d'honneur. On recommande, à cet égard, la plus grande surveillance. Tous les membres de ces ordres devant être porteurs d'un brevet ou d'une lettre d'avis de nomination, il sera facile de s'assurer de l'identité en s'adressant aux ministres de la guerre et de la marine ou au grand chancelier.
La décoration du Chapitre royal de Saint-Denis, destinée aux chanoines titulaires et honoraires, est maintenue. Elle consiste en une croix à huit pointes, suspendue à un ruban violet clair liseré de blanc ; elle se porte en sautoir. Les brevets sont signés par M. le grand aumônier de France.
M. le duc d'Angoulême, à l'occasion de son entrée à Bordeaux, le 12 mars 1814, accorda aux volontaires royaux qui l'accompagnèrent en armes la médaille dite le brassard de Bordeaux. Les brevets ont été délivrés, d'après les ordres de S. A. R., par MM. le chevalier Gombau, colonel, et Taffart de Saint-Germain.
Le roi, par décision postérieure et particulière, a approuvé cette disposition de S. A. R. La médaille porte, d'un côté, la légende : 12 mars 1814, et, sur le revers, deux LL entrelacés ; elle est suspendue à un ruban vert liseré de blanc. Cette marque distinctive est maintenue, mais ne se donne plus.
Le médaillon représentant deux épées croisées, cousu sur le côté gauche de l'habit, et qui se donnait autrefois aux anciens militaires ayant vingt-cinq années de service, est encore porté par quelques invalides ou quelques vieux militaires retirés. Cette marque distinctive ne se donne plus ; mais ceux qui l'ont obtenue peuvent continuer à la porter. Ils doivent être munis d'un brevet du ministre de la guerre.
La décoration du Lis ayant aussi fourni le prétexte à une multitude d'abus, le roi en a donné la surveillance au grand chancelier.
La garde nationale de Paris seule a une décoration particulière autorisée par ordonnance du roi.
L'ordre de Malte est, parmi les ordres étrangers, celui dont on a le plus abusé. Beaucoup d'individus l'ont pris en vertu, disent-ils, d'un droit héréditaire dans leur famille ; d'autres, comme cadets de maison ; ceux-là l'ont reçu d'une commission ; ceux-ci le tiennent d'un lieutenant du magister non encore reconnu par le gouvernement du roi. D'après les termes de l'ordonnance, des titres de cette nature ne peuvent être accueillis.
Cet ordre étant rangé dans la classe des ordres étrangers, nul ne peut l'accepter ni le porter sans l'autorisation de Sa Majesté, obtenue par l'intermédiaire du grand chancelier de la Légion d'honneur.
Tous les sujets du roi qui ont reçu l'ordre de Malte des grands maîtres pendant leur règne, et le très-petit nombre de familles qui l'ont obtenu héréditairement par la même voie, pourront être admis à présenter des demandes en autorisation. Ils se pourvoiront devant le grand chancelier pour lui justifier de leurs titres. S'ils sont reconnus valables et authentiques, ils seront inscrits sur les registres matricules des ordres étrangers, et les titulaires recevront alors une autorisation de Sa Majesté de continuer à porter cet ordre.
On fait observer qu'avant l'ordonnance du 16 avril de la présente année, beaucoup de sujets du roi avaient reçu, par l'intermédiaire du grand chancelier, des autorisations de Sa Majesté d'accepter et de porter des ordres étrangers ; d'autres ont obtenu de S. A. R. Mgr le duc d'Angoulême des autorisations provisoires, par lettre d'avis du major général de l'armée des Pyrénées, M. le comte Guilleminot, pour les deux ordres d'Espagne de Charles III et de Saint-Ferdinand. Les uns et les autres sont en règle, et ne doivent point être inquiétés s'ils justifient de ces autorisations.
Le roi maintient sa décision du 23 avril 1821, qui suspend indéfiniment toute autorisation d'accepter et de porter l'Eperon d'or de Rome et le Phénix d'Hohenlohe ; mais les autorisations accordées avant le 23 avril 1821, par l'intermédiaire du grand chancelier, sont valables. Il suffira d'en justifier.
Il faut remarquer cependant qu'attendu la parfaite ressemblance qui existe entre le ruban de l'Eperon d'or et celui des ordres de Saint-Louis et de la Légion d'honneur, pour éviter toute confusion à cet égard, il a été expressément stipulé, dans les autorisations accordées, que le ruban ne pourrait être porté seul, et qu'il était d'obligation d'y ajouter la décoration. Cette condition doit être rigoureusement exigée.
L'ordre américain de Cincinnatus, qui, d'après une décision royale du 7 avril 1785, ne pouvait plus être autorisé, commence à reparaître. Plusieurs personnes prétendent qu'il est héréditaire dans leur famille. Le roi, par sa décision du 16 avril courant, renouvelle la défense prononcée en 1785.
Cependant quelques autorisations ont été accordées avant l'ordonnance du 16 avril dernier. Les personnes qui les ont obtenues, et qui les représenteront ou en justifieront, pourront continuer à porter cet ordre. Quant aux autorisations accordées avant le 7 avril 1785, elles doivent être renouvelées par l'intermédiaire du grand chancelier.
Le roi a voulu aussi déterminer quelles seraient les classes des divers ordres que ses sujets pourraient porter, suivant leurs grades militaires ou le rang que leur donnent leurs fonctions civiles.
En conséquence, Sa Majesté, par une décision du 16 avril dernier, a prescrit qu'aucun militaire, depuis le grade de colonel inclusivement et au-dessous, ou tout fonctionnaire, dans l'ordre civil, d'un rang analogue aux grades militaires dont il vient d'être parlé, ne puisse porter un grand cordon ou une plaque. Ces distinctions sont exclusivement réservées aux officiers généraux ou aux fonctionnaires civils d'un rang correspondant. Toutes les décisions antérieures contraires à la présente sont révoquées.
Une dernière observation reste à faire. Toutes les autorisations d'accepter et de porter des ordres étrangers sont revêtues du sceau de l'ordre de la Légion d'honneur, appliqué à timbre sec à côté de la signature du grand chancelier.