ORDRE DE L’ÉTOILE NOIRE
- 10 mai 1896 -
C’est le Roi de Porto-Novo, Toffa, qui institua l’Ordre de l’Étoile noire le 1er décembre 1889. Le Roi Toffa devint en 1892 Roi du Dahomey ( aujourd’hui la République du Bénin ) grâce à l’aide de la France, qui envoya un corps expéditionnaire de 4 000 hommes placés sous les ordres du colonel Alfred Dodds. Les troupes de cette expédition qui dura cinq mois, vainquirent à Dogba l’armée du Roi Béhanzin. Une croix et un brevet furent attribués à certains des hommes ayant pris part à cette épopée coloniale.
Selon la revue "Le Monde illustré" ( n° 1841 du 9 juillet 1892 ), le roi Toffa n'aurait « pas hésité à dépenser 5,000 francs pour payer les statuts, brevets et croix de l'Étoile Noire que son agent commercial à Paris, lui a expédiés, pour l'initier aux beautés de la civilisation européenne ». Et le journal d'ajouter également : « Cet ordre exotique de chevalerie coloniale a été créé à l'occasion de la dernière campagne, pour récompenser les services rendus au royaume guinéen. Toffa est grand maître et donne l'accolade aux nouveaux titulaires : le jour de la cérémonie, on lui passe le grand cordon, on lui met sur la tête un grand casque de trompette de dragon, à crinière rouge ; le ban et l'arrière-ban des danseurs et des danseuses sont convoqués au Palais et la population fait fétiche ». Enfin, la revue "Armée et Marine" ( n° 41 du 13 octobre 1901 ) nous décrit, de manière très coloniale, le brevet de l'Ordre : « On voit, dans le haut de ce brevet, une femme blanche debout, tenant de la main droite la main et l'avant-bras gauche d'un nègre qui est agenouillé devant elle, et qui semble la remercier de l'avoir affranchi et la supplier de lui continuer sa protection. Cette femme a la tête placée devant les rayons d'une croix noire et sa main gauche étendue semble indiquer le pays lointain, au-delà des mers, d'où elle est venue avec la mission de travailler à l'affranchissement des nègres. Elle représente bien la France et l'œuvre de justice que cette nation veut réaliser ».
Marquant la reconnaissance du Roi Toffa pour la France, l’Ordre de l’Étoile noire fut réorganisé le 30 août 1892, puis approuvé et reconnu par le Gouvernement français le 30 juillet 1894, en y ajoutant l'obligation absolue de prononcer l'affranchissement des esclaves et de faire cesser les pratiques de la traite et des mauvais traitements infligés à ces déshérités. Enfin, par les décrets des 10 et 23 mai 1896, il devint un de nos cinq Ordres coloniaux. A partir de ce moment, il fut géré par la Grande chancellerie de la Légion d’honneur jusqu’à sa disparition.
C’était un Ordre à cinq classes :
– les grades de Chevalier, d’Officier et de Commandeur ;
– les dignités de Commandeur avec plaque et de Grand-croix.
Contrairement aux Ordres calqués sur la Légion d’honneur, il n’y avait donc pas de Grands officiers, mais des Commandeurs avec plaque, qui portaient la croix de Commandeur en sautoir et la plaque à droite de l’habit.
Le Président de la République française était de droit Grand-croix de l’Ordre de l’Étoile noire.
A l’origine, l’Ordre de l’Étoile noire récompensait les services des sujets du Roi du Dahomey et des Français employés par le protectorat.
A partir de 1896 et jusqu’au décret du 14 juillet 1933, l’Ordre colonial de l’Étoile noire récompensa :
– les personnes qui justifiaient d’un séjour effectif minimum de trois ans outre-mer, dans les territoires de l’Afrique Occidentale Française ;
– les personnes qui ne justifiant pas d’un séjour outre-mer, ont cependant rendu des services à l’expansion coloniale.
A partir du 14 juillet 1933, de nouvelles dispositions furent prises : nul ne pouvait être nommé s’il n'avait pas 29 ans révolus et ne justifiait pas d’au moins neuf années de services civils ou militaires ou de pratique professionnelle, le temps passé outre-mer étant compté pour deux ou trois fois sa durée, selon la nature du séjour.
A l’instar des autres Ordres coloniaux, un contingent spécial, ouvert par décret, a pu récompenser les services rendus par les organisateurs, collaborateurs ou exposants des expositions ou des manifestations importantes purement coloniales.
Le décret du 1er septembre 1950 lui donna la dénomination « d’Ordre de la France d’Outre-mer ».
Le décret du 3 décembre 1963, portant création de l’Ordre national du Mérite, supprima l’Ordre de l’Étoile noire.
Pour un complément d'information sur l'Ordre de l'Étoile noire, voir " Généralités sur les Ordres coloniaux "
Largeur de 37 mm.
Originellement, le ruban était moiré bleu pâle avec des liserés rouges, liserés qui disparaîtront à partir de 1892.
Ruban d’Officier à rosette bleu pâle de 30 mm de diamètre.
Cravate permettant le port en sautoir pour le grade de Commandeur.
Ruban moiré bleu clair de 10 cm de largeur, permettant le port en écharpe, pour la dignité de Grand-croix.
Le décret du 18 juin 1927, autorisa les titulaires Commandeurs, Commandeurs avec plaque et Grands-croix à porter les demi-barrettes métalliques, à l’exemple de la Légion d’honneur.
Croix de Malte à quatre branches émaillées de blanc avec une bordure bleu roi, terminées chacune par deux pointes aiguës non pommetées et reliées entre elles par trois rayons à double pointe.
Une étoile à cinq rayons simples émaillés de noir était placée au centre de la croix.
Bélière formée d’une couronne de feuilles de laurier en émail vert.
L’insigne de Chevalier était en argent, celui d’Officier en vermeil ou en or, tous deux du module de 45 mm.
Les insignes de Commandeur et de Grand-croix étaient en vermeil ou en or et tous deux du module de 65 mm.
La plaque de Grand-croix était en argent et en vermeil.
C’était une grande étoile uniface au module de 86 mm, à huit pointes diamantées constituées chacune par des rayons partant d’une croix de Malte à quatre branches émaillées de blanc avec une bordure bleu roi, terminées chacune par deux pointes aiguës reliées entre elles par trois rayons à double pointe.
Une étoile à cinq rayons simples émaillés de noir était placée au centre de la croix.
( Liste non exhaustive )
Source :
Bibliothèque nationale de France
Nous Toffa, prince royal du Dahomey, par la grâce de l'Être Suprême et la protection de la France, roi de Porto-Novo,
A tous ceux que ces présentes verront, Salut.
Voulant fonder dans notre royaume une institution qui nous permette de récompenser les services de nos sujets et ceux des Européens qui, par leur concours, Nous ont donné des gages de leur dévouement ;
Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit :
Art. 1er. — Est institué dans notre royaume l'Ordre civil et militaire de l'Étoile-Noire du Bénin.
Art. 2. — Le roi, chef souverain du royaume, est grand maître de l'Ordre.
Art. 3. — L'Ordre de l'Étoile-Noire se compose de chevaliers, d'officiers, de commandeurs, de commandeurs avec plaque et de grands-croix.
Art. 4. — Les membres de l'Ordre sont nommés à vie.
Art. 5. — Le nombre des chevaliers n'est pas limité, celui des officiers est fixé à 3000, celui des commandeurs à 1000, celui des commandeurs avec plaque à 500, celui des grands-croix à 100.
Art. 6. — Le modèle de la décoration est une croix d'émail blanc à quatre rayons doubles, bordés de bleu, partagés entre eux par des rayons, surmontée d'une couronne formée de branches de chêne et de laurier. Au centre de cette croix, une étoile d'émail noir à cinq rayons simples.
Art. 7. — La monture et les rayons de la croix sont en argent pour les chevaliers, en or pour les grades supérieurs. Le diamètre est de 45 millimètres pour les chevaliers et officiers et de 62 millimètres pour les commandeurs et grands-croix.
Art. 8. — Les chevaliers portent la décoration attachée sur le côté gauche de la poitrine par un ruban moiré bleu clair de 40 millimètres de largeur.
Les officiers la portent à la même place et avec le même ruban, mais en forme de rosette ; les commandeurs portent la décoration en sautoir attachée au cou par un ruban moiré de même nuance et de 45 millimètres de largeur.
Les commandeurs avec plaque portent en outre sur le côté droit de la poitrine une plaque diamantée tout argent, du diamètre de 90 millimètres, dont le centre représente une étoile.
Les grands-croix portent un ruban moiré bleu clair de 11 centimètres de largeur, en écharpe passant sur l'épaule droite, au bas duquel est attachée la croix. De plus ils portent la plaque sur le côté gauche de la poitrine.
Art. 9. — Nul Européen ne pourra être nommé ou promu dans l'Ordre que sur la proposition du Chef de la Colonie française du Bénin.
Art. 10. — Des brevets, revêtus du sceau du roi, enregistrés au Gouvernement de Porto-Novo et contresignés par le Chef de la Colonie française du Bénin, sont délivrés à tous les membres de l'Ordre nommés ou promus.
Fait en notre palais de Békon, à Porto-Novo, le trente du mois d'août de la mil huit cent quatre-vingt-douzième année de l'ère chrétienne et la dix-huitième de notre règne.
Toffa.